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Société

9 avril 2016

Algérie Résistance / De l’Algérie de Larbi Ben M’hidi à l’Algérie de Chakib Khelil

Algérie Résistance

De l’Algérie de Larbi Ben M’hidi

à l’Algérie de Chakib Khelil

 

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 Samedi 2 avril 2016 

Comme je l’avais annoncé dans mes articles précédents, le retour inévitable de Chakib Khelil constitue l’ultime étape du démantèlement du DRS concocté par Saïd Bouteflika, sous la houlette de divers services étrangers : français, américains et israéliens. Comme me l’ont en effet affirmé certains de mes interlocuteurs algériens, le destin de l’Algérie n’est plus entre les mains des Algériens mais dans celles des puissances occidentales, notamment les États-Unis d’Amérique. Que représente donc le retour de Chakib Khelil en Algérie pour les puissances occidentales ? Chakib Khelil, agent de la CIA est lié à son comparse, Robert W. Pleasant du fantomatique cabinet Pleasant & Associates de New York et dont le nom se retrouve dans la Hess Corporation, une société américaine classée parmi les 100 plus importantes (classement publié par le magazine Fortune) et qui explore, produit, transporte et raffine le pétrole brut et le gaz naturel un peu partout dans le monde, dont en Algérie. Ce mystérieux avocat américain dont on ne trouve aucune trace, ni au barreau new yorkais ni à la Banque mondiale, contrairement aux dires de son ami intime Chakib Khelil qui l’avait imposé comme « expert » lors de son accession au poste de ministre de l’Énergie et des Mines en Algérie, a obtenu 3 millions de dollars dont 2 millions pour avoir pondu la loi criminelle sur les hydrocarbures. Les deux hommes avaient auparavant favorisé la privatisation du secteur de l’énergie au Pérou, au Venezuela, au Brésil et en Argentine lorsque Khelil était chef du département énergétique de la Banque mondiale pour l’Amérique latine, acculant les populations à la misère. En Argentine, Khelil avait poussé le gouvernement à se défaire à moindre coût de sa compagnie nationale pétrolière YPF (Yacimientos Petroliferos Fiscales) au profit de la société espagnole Repsol

Il faut savoir qu’il existe un projet d’Obama, USA 2015, programmé pour les 10 prochaines années qui porte sur le soutien offert par les États-Unis aux futurs jeunes leaders d’Afrique, bien sûr à leur solde, pour faire main basse sur les richesses des pays d’Afrique du Nord. Les États-Unis ont négocié dans le secret avec la Russie pour se partager l’Afrique du Nord et le Moyen Orient, mais l’émergence de la Chine et de l’Inde ont poussé les Américains à adopter une stratégie plus énergique. À cette fin, James R. Clapper, chef de la DNI, a nommé Robert Malley pour mener à bien ce projet qui comprend d’intervenir au niveau sécuritaire, social et économique. Au niveau sécuritaire, l’armée a subi de fortes pressions, notamment avec de profonds bouleversements au sein des services de renseignement qui ont dû accepter de faire des concessions et des compromis. L’ANP est sans relâche sur la brèche, soumise à de multiples tâches : protéger les frontières, faire la chasse aux terroristes et trafiquants de toutes sortes, lutter contre le trafic de drogue qui inonde le pays avec le commerce d’héroïne afghane de Daech, les tonnes de kif traité en provenance du Maroc, et les psychotropes venant de Mauritanie. Au point de vue social, Obama a remplacé le « Center for Strategic Counterterrorism Communications » créé en 2011 par le « Global Engagement Center » dont le décret a été signé le 14 mars 2016. Cet organisme dispose d’un budget de 20 millions de dollars annuels pour subventionner discrètement des blogueurs et des leaders d’opinion dans les pays ciblés. Michael D. Lumpkin a été nommé à la tête de cette structure. Du côté économique, le retour de Chakib Khelil, disciple de l’école de Chicago et de la doctrine de Milton Friedman, promet les réformes économiques prônant la privatisation tous azimuts, comme nous le chante déjà à l’unisson le clan des larbins de Saïd Bouteflika. Endettement, universités privées, hôpitaux privés, autoroutes payantes, personne n’est plus à même que Khelil pour exécuter cette feuille de route dans le but de soumettre l’Algérie au contrôle total des États-Unis sans qu’ils aient besoin d’entrer en guerre pour s’approprier les richesses du pays, plongeant la population dans la misère, comme cela s’est produit dans de nombreux pays déstabilisés au cours de ces dernières années.

 Chakib Khelil, choix du consensus international, est-il le futur président de l’Algérie ? 

L’arrivée de Chakib Khelil a été devancée par toute une série d’évènements, comme la venue du FMI qui a proposé l’endettement à l’Algérie, la peur de Daech que l’on brandit, même si le terrorisme continue ses coups de boutoir et continuera à sévir, néanmoins l’agiter comme un épouvantail à la face des Algériens pour les empêcher d’avancer est une farce macabre. Le seul contrepouvoir qui existe en Algérie n’est autre que l’armée et les services de renseignement, le DRS, ce dernier ayant été neutralisé. Les puissances occidentales ont décidé que Chakib Khelil, ce criminel en col blanc, succédera à Bouteflika en garantissant l’impunité totale au clan Bouteflika et en continuant à les protéger. Le choix de Chakib Khelil n’est pas anodin, et il est nécessaire d’étudier tous les évènements qui se sont produits avant son retour. De nombreuses informations ont circulé marquant l’actualité nationale annonçant le retour du futur président de l’Algérie qui, bien entendu, pourra appliquer son programme en toute tranquillité puisque tout est sous le contrôle de l’Empire. En exfiltrant leur agent des USA pour lui permettre de rejoindre l’Algérie, ce qui le protégera d’une éventuelle inculpation de la justice italienne puisque la Cour de Milan vient d’entamer un nouveau procès sur l’affaire ENI Saipem dans laquelle Chakib Khelil est mouillé jusqu’au cou, les Américains ont fait d’une pierre deux coups : sauver leur joker des griffes de la justice italienne et baliser sa route vers la présidence, aidés en cela par le clan compradore actuellement au pouvoir. Pour rappel, le non-lieu délivré par la Cour d’Appel de Milan à l’encontre de l’ex-numéro un d’ENI Paolo Scaroni, actuellement vice-président de la Banque Rothschild, pour des pots-de-vin versés en Algérie par Saipem, filiale d’ENI, a été annulé par la Cour suprême italienne et un nouveau procès est en cours. Scaroni est désormais dans le collimateur et devra témoigner dans cette grosse affaire de corruption internationale et de fausse déclaration sur le revenu. Des pots-de-vin s’élevant à 198 millions d’euros ont été versés à l’Algérie entre 2007 et 2009 en échange de sept contrats pétroliers d’une valeur de 8 milliards d’euros. Les autres accusés sont l’ancien directeur des opérations de Saipem, Pietro Varone; l’ancien directeur des finances (Saipem ENI), Alessandro Bernini; l’ancien président et chef de la direction Saipem, Pietro Tali; le « collecteur de pots de vin », Noureddine Farid Bedjaoui, qui était l’homme de confiance de Chekib Khelil; le confident de Bedjaoui, Samyr Ouraied, et l’entrepreneur algérien Omar Haboud. Tous sont accusés de corruption internationale. Varone, Tali, Bernini, Bedjaoui et Ouraied sont également accusés de déclaration frauduleuse sur le revenu. En outre, le Parquet a demandé que les preuves récoltées soient admises par la Cour, dont les enregistrements d’écoutes téléphoniques ainsi que les témoignages relatant les diverses rencontres secrètes dans des hôtels de luxe des capitales européennes entre Scaroni et Khelil. Dans l’un des enregistrements téléphoniques entre Scaroni et le ministre italien du Développement économique de l’époque, Corrado Passera, ce dernier étant inculpé dans diverses affaires de corruption en cours de jugement, Scaroni déclarait au ministre avoir envoyé ces 198 millions de dollars en disant qu’ils « étaient en quelque sorte des pots-de-vin ». Ces 198 millions de dollars auraient été versés par Saipem au ministre algérien de l’énergie Chekib Khelil et son entourage via la société off-shore Pearl Partners Limited basée à Hong Kong appartenant à Farid Bedjaoui. D’autre part, l’avocat de Bedjaoui a demandé à la Cour d’interroger son client et de convoquer Chakib Khelil comme témoin. N’oublions pas que Chakib Khelil a été sous mandat d’arrêt international, retiré plus tard sur injonction d’Abdelaziz Bouteflika, pour vice de procédure parce que soi-disant « mal rédigé ». Qui donc l’a mal rédigé ? Va-t-on essayer de nous faire croire qu’aucun magistrat en Algérie n’est capable de rédiger correctement un mandat d’arrêt international ? Cela sent le coup fourré. Souvenons-nous que Mohamed Charfi, le ministre de la Justice « remercié » en septembre 2013, et Belkacem Zeghmati, l’ex-procureur général près la Cour d’Alger qui avait lancé des mandats d’arrêt internationaux à l’encontre de Khelil et sa famille, et limogé en septembre 2015, ont tous deux déclaré que Khelil était coupable d’avoir volé Sonatrach. Ce sont des faits documentés. Je suis en contact permanent avec la Cour de Milan, et je ne le lâcherai pas. 

À ceux qui considèrent Chakib Khelil le traître comme compétent, et il y en a, je leur assure que les assassins financiers sont toujours compétents  dans la destruction des pays dans lesquels ils sont envoyés. Leur mission de destruction d’une économie ou d’un pays est toujours une « réussite ». Chakib Khelil a détruit l’économie algérienne, et les PV d’auditions sont là pour le prouver. Khelil a préconisé la surexploitation des gisements en se moquant éperdument de la règle qui préconise de réinjecter une partie des gaz extraits afin de maintenir la pression. L’ancien PDG de Sonatrach, Nazim Zouioueche, a expliqué sur Radio M : « Il était normalement question de réinjecter 60 sur les 92 milliards de m3 extraits et de ne commercialiser que 32 milliards de m3. Mais des arbitrages ont été faits il y a près de dix ans en faveur de l’augmentation des volumes à commercialiser au détriment de la vie du gisement. Cela a pour conséquence une baisse de pression et donc des taux de récupération moindres. Si on ne fait rien maintenant, ce sont 40% des volumes de ce gisement qui vont être piégés à jamais, soit 1500 milliards de mètres cubes de gaz d’une valeur d’environ 450 milliards de dollars US… Ces 1500 milliards de m3 de gaz que l’Algérie risque de ne pas produire représentent une dizaine d’années de recettes d’exportations en hydrocarbures » . Lors du procès Sonatrach, le témoignage de Meziane, le PDG de Sonatrach, qui dit qu’il ne décidait de rien et prenait ses ordres auprès du ministre Khelil qui lui téléphonait, est noté noir sur blanc. Donc, Chakib Khelil porte la responsabilité de l’affaire Sonatrach 1 et 2. Dans le cas de Cosider, selon les propos récents du député FLN Wahid Bouabdellah dans El Khabar, Khelil avait refusé d’octroyer à Cosider canalisations la réalisation du gazoduc GR2, alors que la loi donne la primauté aux entreprises algériennes dans les appels d’offres et qu’en outre Cosider était trois fois moins chère que Saipem qui a obtenu le contrat. Que fait la justice face à cette attribution de marché illégale ? Faut-il parler aussi de la surfacturation du palais des Congrès d’Oran sous Khelil, méga complexe aux nombreuses salles de conférence qui a coûté 600 millions de dollars et où il ne se passe rien ? Faut-il évoquer le scandale BRC (Brown and Root Condor) firme mixte algéro-américaine, dont le capital était détenu à 51% par la Sonatrach et à 49% par l’Halliburton de Dick Cheney, avec les surfacturations hallucinantes et la sous-traitance illégale, quand BRC recevait des marchés en gré à gré de la Sonatrach, sans aucun appel d’offres, sous les auspices de Khelil, alors ministre de l’Énergie ? Faut-il aussi évoquer les cinq comptes que celui-ci possède dans des banques suisses, ainsi que ceux de sa femme et ses deux fils ? Où est la commission d’enquête parlementaire chargée de faire toute la lumière sur ces affaires ? Si Khelil était blanc comme neige, pourquoi a-t-il fui le pays comme le voleur qu’il n’a jamais cessé d’être ? J’ai en ma possession un document démontrant que Chakib Khelil possède plusieurs comptes privés dans une banque en Suisse et au Crédit Lyonnais. Parmi ces comptes ouverts personnellement par Chakib Khelil au cours de l’année 2007, le premier a été ouvert dans une banque de la Place Bel Air à Genève sous le numéro 104 088 C dans lequel le premier dépôt d’ouverture s’élevait à 1.220.000 $. Il s’agit d’un carnet de dépôt à taux d’intérêt. Plusieurs fois, la ligne téléphonique directe de la présidence a été utilisée pour donner des conseils au gérant du compte appelé Dominique Stocker dont je détiens le numéro de téléphone. Les conversations téléphoniques ont été enregistrées. Le deuxième compte porte le numéro 5039500321288 et contient plusieurs millions de dollars provenant de commissions liées à divers contrats avec des sociétés étrangères. Khelil possède aussi un compte spécial au Luxembourg géré par un certain Pascal Gurndrich dont je connais aussi le numéro de téléphone. Même topo à Monaco où Khelil est possesseur d’un compte dans une banque du centre de Monaco 98000. Chakib Khelil détient plus de 8 millions de dollars sur ce compte n° 74 293, dont Philippe Sarlin est le gérant et dont je connais aussi le numéro de téléphone. Les transferts sont effectués pour l’achat d’œuvres d’art destinées à une galerie appartenant à Khelil située dans le centre de Monaco. Balayant tous ces faits du revers de la main, les escrocs du clan Bouteflika essaient aujourd’hui de blanchir cette crapule en col blanc pour le porter au poste de président.

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Quand les mafieux Saïdani, Ghoul, Haddad, vantent les mérites d’un autre mafieux 

Les Américains ont donc placé leur joker Khelil en bonne position pour être l’homme du consensus afin de razzier tout ce qu’il reste à rafler en Algérie et plonger le pays dans l’endettement qui nous mènera au dépècement du pays en séparant le sud « utile » du nord inutile. Leur choix préalable portant sur Lakhdar Brahimi a été abandonné, Brahimi étant jugé peu fiable parce que trop proche des Russes, notamment via sa déclaration où il a déclaré que si l’Europe avait écouté la Russie, la situation en Syrie aurait été réglée plus tôt. Certains zouaves du régime pourri, Saïdani, Ouyahia, Ghoul, Haddad, etc. ont bien préparé le terrain pour le retour du « héros », ces danseuses du ventre nous chantant la même rengaine via leurs outils médiatiques mercenaires et corrompus qui nous ont offert des spectacles pornographiques. Le résultat est là, le peuple algérien est devant le fait accompli. Ceux qui ont réhabilité Khelil sur les ordres de Saïd et ses maîtres d’outremer, tous les valets du clan présidentiel, larbins et autres escrocs qui ont porté aux nues cet assassin financier, blanchissent de facto Saïd Bouteflika qui est apparu dans des enquêtes et divers scandales, notamment celui de l’autoroute Est-Ouest, et son larbin Saïdani le voleur des fonds agricoles du FNDA, (Fonds national de développement agricole) et consorts, tout en accusant le DRS d’avoir trafiqué les dossiers, alors que tous ces gens ont pillé les caisses de l’État. Les preuves existent aux mains des agents qui ont travaillé pendant des années sur leurs dossiers. Pour l’anecdote, c’est Ouyahia qui a donné l’ordre à l’IGF d’enquêter sur l’affaire de la GCA (Générale des concessions agricoles) et des fonds détournés par Saïdani. Tel est l’État civil dont on ne cesse de nous rabâcher les oreilles, un État qui réhabilitera les voleurs et les assassins économiques à la suite des criminels du FIS et autres terroristes. C’est dans ce cadre que s’inscrit la venue de Chakib Khelil. Nous avons assisté à une diversion macabre et vicieuse de la part du drabki Saïdani qui a même osé utiliser le cas des cadres malheureux qui ont vraiment été lésés dans leurs droits en ayant été jetés en prison lors de l’opération « mains propres » des années 1990, menée par l’homme des sales besognes, Ahmed Ouyahia, l’autre crapule du système. Saïdani a utilisé ces véritables sacrifiés pour faire passer Chakib Khelil en tant que victime. Chakib Khelil « victime », quelle blague ! Cette diversion au comble du cynisme ne dupe cependant personne. Blanchir Chakib Khelil équivaut à le disculper d’être un agent américain qui a travaillé dans la Banque mondiale, qui a dirigé l’OPEP, et les documents prouvant qu’il est un agent de l’Empire existent. Ses enfants et sa femme sont tous américains et ont été visés par le même mandat d’arrêt. Le fils de Chakib Khelil, Sina Khelil, est, comme je l’ai déjà dit, patron de Khelil Entreprise et va revenir également en Algérie pour pouvoir prospecter et prendre ce qu’il reste de réserves de change. Sina Khelil est aussi à la tête de deux autres entreprises Saufis LCC et Le Advisory Board Company, spécialisées dans les programmes informatiques, après avoir géré au moins cinq autres sociétés. Quant au deuxième fils, Khaldoun Khelil, il est associé à Farid Bedjaoui dans plusieurs entreprises. Et l’on nous dira encore qu’ils ont du mal à boucler les fins de mois. Leur nationalité américaine explique pourquoi Saïdani a attaqué l’article 51 du torchon promu « nouvelle Constitution », article écrit par le même clan. Tout se fait « Inside the box », au sein du même clan. Mais l’article 51 va certainement être amendé puisque Khelil est le choix des Américains et que cet article va à l’encontre de leurs intérêts. Chakib Khelil n’est pas n’importe qui, et certainement pas un cadre lésé comme l’affirme le drabki. Même Louisa Hanoune qui avait pourtant l’habitude d’attaquer cet assassin financier, n’a osé évoquer son retour que du bout des lèvres de peur de perdre ses privilèges et sa place confortable. 

Certains médias mercenaires ont été instrumentalisés, dont Ennahar d’Anis Rahmani, le fils de harki et toutou de Saïd, et ont osé dire que le DRS du général Toufik avait fabriqué des dossiers, qu’ils le prouvent! Ils veulent attaquer Toufik, Charfi, Zeghmati ? Chiche ! Qu’ils le fassent. Nous avons toutes les informations qui les concernent ainsi que leurs rejetons gavés avec l’argent du peuple algérien. Aujourd’hui, le combat de tous les patriotes est de foudroyer l’ennemi interne, nous n’avons plus le choix. Il aurait pu y avoir un changement en douceur, en nous dirigeant vers un État de droit, pas celui dont nous gave la clientèle du régime pourri du clan présidentiel. Il faut que chacun sache que le retour de ce sinistre personnage à un but tout autre que celui de se faire bronzer sur la plage d’Oran et est éminemment politique. D’ailleurs, il suffit d’écouter les aboiements du drabki Saïdani pour en être convaincu. Il ne s’en cache pas et annonce fièrement que Bouteflika va nommer Khelil à un poste à responsabilité prochainement. Quoi de plus naturel pour un repris de justice d’en protéger un autre ? Car si Khelil a été ciblé par un mandat d’arrêt international pour corruption caractérisée, le drabki lui-même a été condamné en 1996 à un an de prison ferme pour coups et blessures volontaires, destruction de biens d’autrui, menaces et violences à l’encontre de Brahim Youcef, natif de Oued Souf et militant FLN à cette époque, et qui s’est retrouvé un mois à l’hôpital suite à l’agression qu’il avait subie par Saïdani et seize de ses acolytes, comme indiqué dans le dossier n°10441/96 de la cour de Biskra. Étrangement, le drabki n’a pas purgé sa peine. Ce 30 mars, Saïdani a offert un spectacle digne des jeux du cirque romains en organisant un rassemblement à la Coupole à Alger pour affirmer son soutien au vieillard transbahuté en chaise roulante qui tient lieu de président. Le clown Ghoul et quelques autres larbins se sont produits à ses côtés dans une vaine tentative de contrer la réunion de l’opposition Mazafran 2 qui se déroulait en même temps. Une bagarre a éclaté et les journalistes présents, y compris des consœurs, ont été molestés, ce qui est un autre scandale à mettre à l’actif de cette bande de dégénérés qui sèment la pagaille partout où ils apparaissent. Telle est l’image de l’Algérie d’aujourd’hui véhiculée par le clan bouteflikien et ses valets : une foire d’empoigne. Aujourd’hui, Saïdani n’en rate pas une pour tirer à boulets rouges sur Ouyahia. Le divorce entre les deux est consommé, même si nous apprenons, surpris, que ces deux-là ont été mariés. On a cru que Saïdani était marié avec Tliba, mais nous avons été bernés dans les grandes largeurs (c’est le cas de le dire !). Il est vrai que dans le harem de Bouteflika, une vache ne retrouverait pas son veau. Tout le monde se cocufie à qui mieux-mieux. Je conseille à Ouyahia de rentrer chez lui et de se consacrer à ses yaourts en tirant un trait sur ses ambitions ministérielles, voire présidentielles. Il a fait assez de mal au cours de sa trop longue carrière et il finit avec la derbouka de Saïdani en pleine poire. Quant à Saïdani qui tape comme un sourd sur sa derbouka pour battre le rappel afin de construire un mur de soutien au président remorqué, je l’avertis que confier la construction de ce mur à Haddad le kharay, en gré à gré comme d’habitude, serait une erreur fatale, car même s’il le termine, ce qui est loin d’être acquis, le mur finira par s’effondrer et, au lieu de soutien, il risque d’ensevelir le plus célèbre fauteuil à roulettes de la planète, son occupant et tous les pousseurs de charrette. 

Comme d’habitude, je mets au défi le kharay Haddad, le prête-nom et bras économique de Saïd, de me dire qu’il a produit un boulon ou un tournevis. Il n’a même pas été fichu de terminer les tronçons routiers qui lui ont été attribués, notamment la route du port de Djen Djen à El Eulma, un scandale de plus. Comment le pourrait-il puisqu’il est incapable de lire sans se fourvoyer un discours que Saïd lui a fourni. Je conseille d’ailleurs à Saïd de trouver d’autres hérauts pour faire l’éloge de sa politique, les actuels étant par trop sujets à caution. Je continue à taper sur le clou (que Haddad n’a pas produit) pour que ces gens comprennent que l’on n’oublie rien. Ils comptent sur la mémoire courte de l’opinion publique, mais, moi, je ne les lâche pas. J’aimerais demander au ministre des Travaux publics si les chantiers d’Ali Haddad el mgemmel avancent enfin. Je suis un homme du concret et j’ai une aversion viscérale pour les bobards et les blablas, donc je voudrais savoir si les travaux avancent et quel pourcentage ils ont atteint. Je sais qu’ils n’avancent pas, donc donnez-nous les raisons pour lesquelles ils stagnent. C’est l’entreprise de Haddad qui est censée effectuer les travaux de Djen Djen avec l’entreprise italienne Rizzani de Eccher qui a abandonné le chantier à cause du kharay Haddad. Est-ce que l’autre tronçon de Bouira qui continue à causer des accidents mortels, est en voie d’achèvement ou pas ? Le stade de Tizi Ouzou est-il terminé ou pas ? Et j’en passe ! Haddad a pu continuer à pousser ses brouettes en toute tranquillité pendant la décennie sanglante en payant un tribu aux groupes terroristes. C’était la condition pour ne pas voir détruire ses camions qui volaient le sable la nuit dans les côtes et les oueds de la Grande Kabylie. À cette époque, la gendarmerie était interdite d’entrée dans la région suite aux évènements en Kabylie de 2001 et les voleurs de sable profitaient de cette absence pour se livrer à leur trafic. Haddad a payé une rançon de 25 milliards de centimes aux terroristes pour libérer son frère Meziane qui avait été kidnappé en avril 2006 par le GSPC parce que Haddad était en retard dans le paiement de sa dîme mensuelle aux terroristes. Meziane et Haddad ont reconnu le versement de ces 25 milliards mais n’ont pas été emprisonnés pour aide logistique aux terroristes. Où est la loi qui sanctionne le payement des rançons ? Revenons à la genèse de l’entreprise ETRHB Haddad. J’ai en ma possession un acte notarial qui montre la naissance de cette société qui reçoit aujourd’hui tous les grands chantiers en gré à gré, et comment Ali Haddad et ses frères volaient le sable de la Grande Kabylie. Au départ, l’ETRHB Haddad se nommait la Sablière N’Chaouffa, Registre de Commerce n° 05 8 0045702. L’acte notarial enregistre une augmentation du capital de la Sablière N’Chaouffa de la somme de 32 750 000 DA (3275 nouvelles actions), l’action passant de 1000 à 10 000 DA, le nouveau capital étant fixé à 34 350 000 DA divisé en 3 435 actions de 10 000 dinars chacune, souscrites et libérées totalement. Par ailleurs, la dénomination sociale de la société Sablière N’Chaouffa/SPA devient ETRHB CONSTRUCTIONS/SPA. Cet acte a été rédigé par l’étude notariale de maître Farida Belgherbi, Résidence Les Rosiers Bt A n° 01 à Hydra Alger, code du notaire 0002785. Il faut savoir que la société ETRHB d’Ali Haddad, propulsé par le général Touati et ensuite par Saïd Bouteflika, voit son capital composé à 70 % d’emprunts aux banques qui n’ont pas été remboursés jusqu’à présent. Je détiens un document bancaire qui révèle que l’entreprise ETRHB, dont les actionnaires majoritaires sont à parts égales Ali Haddad, Mohamed Haddad, Ahmed Haddad, Amar Haddad, Meziane Haddad, Omar Haddad, a recours à l’emprunt. Siège social : Zone d’activité lot N° 20, Saïd Hamdine, Bir Mourad, Rais, Alger, dont le capital social est de 8.800 milliards de dinars et qui emprunte 6 milliards de DA. Les frères Dalton en somme. J’avais déjà révélé dans un ancien article que Haddad avait acquis la société Kerafrit à Nules en Espagne. Il s’avère qu’il a bénéficié d’un prêt de 100 millions d’euros auprès des banques algériennes pour mettre la main sur Kerafrit. J’ai décrit l’opération d’achat de Kerafritpar Haddad, l’associé de Saïd Bouteflika, ainsi que de l’Hôtel Palace ex-Ritz de Barcelone, dont la fille de l’ambassadeur algérien à Londres a été nommée directrice de l’hôtel. Mes lecteurs peuvent lire cet article détaillé datant du 15 février 2015 ici :https://mohsenabdelmoumen.wordpress.com/2015/02/14/lalgerie-nest-pas-votre-propriete-privee-ali-haddad/  L’achat de Kerafrit est une opération juteuse qui permet à Ali Haddad d’acheter des produits à moindre coût pour ensuite les revendre en gonflant les prix aux cinq sociétés du groupe Haddad Céramiques qui lui appartient aussi et à la tête desquelles figurent ses frères : SNC Céramiques El Mostaqbel, la SARL Céramiques El Hidhab, la SARL Latino Céram, la SARL SitCeram et la SARL Haddad Ceramic, implantées à Sétif dans la zone industrielle d’El Eulma. Un tableau des dépenses du groupe Haddad en ma possession montre que de janvier à mars 2014, soit en deux mois, 443.315 euros sont partis grossir les comptes off shore d’Ali Haddad, via le procédé de la surfacturation. Ainsi donc, des sommes pharamineuses en devises quittent les comptes du groupe Haddad au Crédit Populaire Algérien et à la banque Al Baraka de Sétif pour divers paradis fiscaux. Il agit en toute impunité et on comprend pourquoi cette crapule défend bec et ongles Chakib Khelil. 

Ce n’est pas tout, pour ses déplacements, Ali Haddad loue à prix d’or un jet privé d’une valeur de 4 millions de dollars à une entreprise appartenant à la famille Fechkeur de Hassi Messaoud où sont implantés des affairistes algériens ayant la nationalité américaine. Le PDG du géant des services parapétroliers RedMed, Abdelmadjid Fechkeur, surnommé le Monsieur Pétrole d’Ali Haddad et de son maître Saïd Bouteflika appartient à une famille d’escrocs qui entretient une relation financière avec les Bouteflika et la mafia politico-financière aux USA, et qui ont saigné Sonatrach. Ça continue : concernant le FCE dont le président est Ali Haddad el Goudrone, lorsque les réunions de l’association patronale se tiennent dans la wilaya d’Aïn Témouchent, elles se déroulent dans le village touristique Dorian Beach Club, fondé par le représentant du FCE à Aïn Témouchent, Brahim Tourki, propriétaire de villas et d’appartements à Oran, Alger, et Tlemcen. À la fin des réunions, Tourki se transforme en organisateur de nuits torrides en fournissant un bateau où se déroulent des parties fines bien arrosées avec des prostituées et la distribution d’alcool et de cocaïne. Et pour couronner le tout, Ali Haddad ose déclarer aujourd’hui que les procès Sonatrach 1 et 2 sont khorti (pipeau). Un kharay se permet de juger la justice algérienne et italienne et encourage Khelil à « travailler » en Algérie, ou plutôt à voler comme il l’a toujours fait. De quoi se mêle cette canaille ? Croît-il qu’il sera toujours au-dessus de la justice ? Et ce voyou parvenu ose parler d’assistanat et de la fin de l’État providence ! Haddad est l’exemple type du parasite et de la fuite massive des devises à l’étranger. La place d’Haddad est en prison jusqu’à la fin de ses jours pour avoir pillé l’Algérie pendant des années. Et puisqu’il s’entend si bien avec ses frères, je suggère qu’on les mette tous dans la même cellule. Ce que j’ai dévoilé ici et dans mes précédents articles n’est que la pointe de l’iceberg tant ces gens sont dépravés et s’estiment invulnérables. Et pendant que ces charognards se repaissent sans scrupule du corps de notre patrie, le général Benhadid est toujours en prison, sa demande de liberté conditionnelle ayant été rejetée pour la quatrième fois. Il est accusé d’avoir nui au moral de l’armée. C’est vous, les Saïd Bouteflika, les Ouyahia, Haddad, Saïdani, Tliba, Bouchouareb, Ghoul, et consorts qui portez atteinte au moral de l’armée et du peuple, et qui devriez être en prison à la place de Benhadid ! Toujours en prison aussi, le général Hassan et le général Medjdoub, comme des centaines voire des milliers d’Algériens innocents. Et nous ne savons toujours pas qui a tué Ali Tounsi, directeur général de la Sûreté nationale, car selon Maître Belaarif, l’avocat de Chouaib Oultache, l’assassin présumé qui n’a pas encore été jugé, si Oultache a bien blessé Tounsi au thorax, les impacts dans la tête de la victime ne sont pas dus à son arme. Alors, qui a tué Ali Tounsi ? 

En outre, depuis dimanche, face à l’Algérie des Bouteflika, Khelil, Saïdani et consorts, cette bande de gredins infâmes, des centaines d’enseignants contractuels venus de plusieurs wilayas ont commencé une marche de protestation. La marche de la dignité partie de Béjaïa à Alger est entreprise par de jeunes enseignants qui demandent à être intégrés dans le corps des enseignants sans passer de concours. La plupart d’entre eux enseignent depuis des années sans que leur statut soit régularisé et refusent la précarité de leur condition. Ils sont soutenus par les citoyens qui leur offrent leur sympathie et leur solidarité en les accueillant tout au long du chemin. La marche qui avait commencé avec un millier de participants est rejointe en cours de route par plus d’un millier d’autres qui, malgré la difficulté de ce long voyage (quelques 230 km), viennent grossir les rangs. Tout mon soutien va à ces enseignants dont la demande est tout à fait légitime et qui a été méprisée par la ministre de l’Éducation nationale. Par ailleurs, le clan des mafieux a osé porter atteinte à la mémoire de Larbi Ben M’hidi en faisant installer deux bustes monstrueux de notre martyr, commandés à coups de milliards de dinars (2 pour le premier et 4 pour le second). Je salue le patriotisme des citoyens de Aïn M’lila qui ont couvert cette statue immonde et se sont mobilisés pour enlever cette horreur, montrant à ces crapules qu’on de joue pas avec les symboles de la Révolution. Ces voleurs ont pillé le pays, et maintenant ils s’en prennent à ce qu’il y a de plus beau et de plus pur dans notre patrie. Le peuple algérien montre qu’il est très mature politiquement et qu’il tient à son pays. L’ennemi de l’Algérie, c’est Bouteflika et sa clique. Ben M’hidi est dans notre cœur et personne ne pourra jamais l’atteindre. Il s’est battu et est mort pour l’Algérie et il n’a pas besoin de vos saletés. Laissez nos martyrs tranquilles, bande de crapules !

Tout ce qui se passe actuellement reflète les vues du clan Bouteflika pour un cinquième mandat, chacun doit en être conscient. Rien ne les arrêtera. L’Algérie sous Bouteflika a généré une flopée de lèche-bottes et de virtuoses de la brosse à reluire prêts à tout pour grignoter les miettes qui leur sont jetées. J’ai interpelé l’ANP qui est une armée populaire, j’interpelle aussi le peuple parce que nous sommes arrivés à la croisée des chemins et que nous devons choisir la voie à suivre. Nous ne pouvons pas assister à la ruine de notre pays sans broncher. Tout le harem de Bouteflika trimballe des casseroles. Le destin de l’Algérie est entre les mains extérieures et chacun tapine pour une force étrangère. Comme dit l’adage algérien : « khobz dar yaklou el barani » (le pain de la maison est mangé par un étranger). On voit que le système rentier basé sur le pétrole, les ressources, etc. dans lequel tous ces individus se sont engouffrés a mené le pays vers nulle part. On n’a rien produit, strictement rien. On a tellement malmené le peuple algérien qu’il est dans un processus d’agression envers lui-même et rejette tout ce qui est algérien. À force de provoquer le peuple avec des propos blessants, on a l’impression que c’est le clan des mafieux qui veut mettre le feu à la maison Algérie, et l’illustration en est la tirade de Nouria Hafsi du RND qui a déclaré lors du meeting sous forme de souk du zemmarSaïdani, s’appropriant la phrase célèbre de Ben M’hidi: « jetez la révolution dans la rue, le peuple la prendra ». Cette folle furieuse est-elle consciente de ce qu’elle dit au moment où tout le monde se bastonne dans la salle ? Les larbins de Saïdani appellent-ils le peuple à se révolter ? C’est de la science fiction et va à l’encontre du chantage du clan mafieux au pouvoir qui passe son temps à soûler le peuple algérien avec la menace de Daech en lui brandissant l’exemple de la Syrie et de la Libye, alors que chacun sait que le principal danger pour notre pays n’est autre que la bourgeoisie compradore qui continue le pillage systématique de nos richesses. Même si Daech est dangereux, ces crapules au pouvoir sont les alliés naturels des terroristes. Le peuple subit les provocations multiples de leurs rejetons qui font tous des affaires dont nous savons tout, et les noms et les lieux, et s’il y a bien un mur à construire, c’est celui des geôles de ces voyous. Assez de récupération politicienne de la situation géopolitique très difficile de l’Algérie ! Au moment où les nations se réunissent sur le nucléaire à Washington, l’Algérie envoie son Mickey Mouse-Sellal parce qu’il n’y a pas de président capable de voyager, sinon en urgence pour se faire soigner à l’étranger. Donc, il y a bel et bien vacance de pouvoir. C’est un secret de polichinelle. Tout le monde peut tomber malade, mais quand on occupe une fonction à responsabilité, telle que celle de président de la république, on doit l’assumer. Le changement doit avoir lieu, ces gens n’ont pas reçu l’Algérie en héritage, elle n’est pas leur propriété privée et personne n’a besoin de leur soutien. Et surtout pas l’armée ! L’ANP est l’armée de tout le peuple algérien, elle n’est la propriété de personne. Nul n’a le droit de se l’approprier et elle doit être au-dessus de tous les clans. C’est une armée populaire, donc issue du peuple et qui défend la patrie et le peuple. Et je dis à Saïdani et à ses chiens enragés que l’armée algérienne n’a pas besoin de leur soutien. Foutez-lui la paix ! Elle fait son travail sereinement et efficacement. Ce sont les enfants du peuple qui sont dans l’armée, nos fils, nos frères, nos neveux, et non pas vos enfants de la jet set qui font du bizness à Paris ou à Londres ! Ce n’est certes pas Rym Sellal, Samy et Aghiles Haddad, neveu et fils de Haddad, ni Sina Khelil, Kenza Saïdani, Farid Bedjaoui, ou les neveux d’Abdelaziz Bouteflika, et autres enfants gâtés et privilégiés, ni Cheb Abdou, qui vont défendre la patrie comme le font nos braves soldats. Alors que les soldats algériens meurent, on aurait aimé que le pouvoir instaure un deuil comme il l’a fait pour le roi des bédouins d’Arabie saoudite, mais la clique au pouvoir ne se préoccupe pas de la vie de nos soldats.

Ce sont ces gens de la clique et eux seuls qui constituent le problème, et tout problème doit être solutionné. Il faut contrer Chakib Khelil et on a vu comment il a été pourchassé en plein centre d’Alger. Osez aller prendre un café sans garde du corps dans n’importe quel quartier populaire ! Dieu merci, nous pouvons le faire et pas vous. Il faut contrer tout le clan présidentiel ainsi que le plan US et le néocolonialisme d’où qu’il vienne en s’inscrivant dans une dynamique de résistance internationale. C’est pour cette raison que j’ai privilégié dès le départ un combat internationaliste contre ces suppôts de l’impérialisme, parce que c’est ce qu’ils sont. Ces agents peuvent être appelés coopérants techniques mais il faut surtout les nommer pour ce qu’ils sont : des assassins économiques, des liquidateurs de pays. L’Algérie aujourd’hui vit une véritable hémorragie. Dans mon article précédent, j’ai parlé d’un retour aux institutions. La seule chose qui doit être faite, c’est de créer à nouveau des institutions, ce que l’on n’a pas fait, car quand on voit le résultat actuel après une ouverture avec la Constitution de 1989 établissant le multipartisme, une soi-disant liberté de la presse, le résultat est loin d’être satisfaisant. Donc, il faut tout remettre à plat et passer le cap vers un second souffle, une deuxième étape. On peut même l’appeler une deuxième République, peu importe son nom. Ce pouvoir pourri n’a pas appris la leçon de la fin des Ben Ali, Moubarak, Khadafi, qui se comportaient en pharaons et qui n’ont jamais créé des institutions et des États modernes avec des contrepouvoirs et des institutions légitimes et fortes. Ils faisaient la pluie et le beau temps, regardez la façon dont ils ont fini. Le pouvoir personnel et autocratique tue l’État. C’est pour cette raison qu’il faut restituer le pouvoir à des institutions solides. Il en va de la survie de l’Algérie.

Mohsen Abdelmoumen

Published in Oximity, April 2, 2016:https://www.oximity.com/article/De-l-Alg%C3%A9rie-de-Larbi-Ben-M-hidi-1

http://www.palestine-solidarite.org/analyses.mohsen_abdelmoumen.020416.htm

 

 

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9 avril 2016

POST FACE pour ESSAI de HOCINE BELLALOUFI / LA DÉMOCRATIE EN ALGÉRIE " Réforme ou révolution?

 

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9 avril 2016

L'Algérie, un pays non identifié / Algérie: la révolution si loin, si proche

 

L'Algérie, un pays non identifié 

Algérie: la révolution si loin, si proche

L’Algérie avait l’air d’être prête pour la révolution – mais le soufflé est retombé. Que s’est-il passé?

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Une femme marche devant des posters de campagne d'Abdelaziz Bouteflika le 24 mars 2009

 

Quel est le problème de l’Algérie? L’année dernière, la fièvre du Printemps arabe s’est emparée d’un pays après l’autre. Des monarchies comme le Maroc ou la Jordanie ont réussi à diriger la colère populaire contre le gouvernement plutôt que le chef d’État; des États pétroliers comme le Qatar ou le Koweit ont acheté la paix sociale. Mais aucune république autocratique, aussi brutale soit-elle, n’a pu résister à la tempête ― excepté l’Algérie. Il s’agit pourtant d’un pays où grèves et manifestations étaient monnaie courante bien avant 2011, où la presse se moquait ouvertement d’un dirigeant affaibli, où forces de sécurité et voyous pro-régime affrontaient les émeutiers au milieu des premiers frémissements du Printemps arabe. Il y a un an, on aurait pu parier que l’Algérie était le pays le plus susceptible de renverser son chef d’État. Il n’en a rien été. En fait, les manifestations ont tourné court. Pourquoi? Pourquoi ailleurs, et pas en Algérie? 

L'Algérie, un pays non identifié 

Très peu d’Américains visitent l’Algérie, ou l’étudient, ou y connaissent grand-chose. Vous ne saviez probablement pas, par exemple, que l’Algérie est le plus grand pays d’Afrique—plus grand même que le Soudan avant sa division, dont on estime que la taille est à peu près équivalente à celle de l’Europe occidentale. Certes, la plus grande partie est occupée par le désert du Sahara, mais avec 35 millions d’habitants l’Algérie est aussi la deuxième plus grande nation du monde arabe (derrière l’Égypte évidemment). Elle se classe à la quatrième place mondiale en termes de réserves de gaz naturel. Ses fonds souverains se montent à 150 milliards de dollars. Vous commencez à avoir un peu honte de ne pas en savoir plus sur l’Algérie? 

Comme la Tunisie et le Maroc, l’Algérie était une colonie française. Mais la France dirigeait l’Algérie comme une extension d’outre-mer de la patrie, dont elle ne voulait, ou ne pouvait, se défaire. L’autorité française en Algérie s’acheva avec l’épouvantable guerre civile de 1954-1962, conflit dont les atrocités sont évoquées dans le célèbre film de Gilles Pontecorvo La bataille d’Alger. La guerre anticoloniale violenta la société algérienne et laissa dans son sillage un héritage de rhétorique et de pose révolutionnaires. L’Algérie devint une autocratie d’avant-garde—le Cuba du Maghreb. L’État s’y drapa dans l’étendard de la révolution. 

La démocratie, en vain... 

Une chose remarquable se produisit alors: Chadli Benjedid, un président installé par les dirigeants militaires de l’ombre, décida de tenter la démocratie. Après sa réélection en 1988, Benjedid promulgua une nouvelle constitution qu’il soumit à un referendum. Cette constitution éliminait toute référence au socialisme, levait les restrictions sur la liberté d’expression et légalisait les syndicats et les partis politiques. Comme le souligne un des rares experts américains de l’Algérie, John P. Entelis, dans le numéro actuel de The Journal of North African Studies, en quelques mois «le système politique algérien a été fondamentalement bouleversé pour passer d’un État autoritaire à parti unique à un état de droit multipartite et pluraliste.» 

Au cours des deux années qui suivirent, l’Algérie se livra à un exercice de démocratie que le monde arabe n’avait encore jamais connu et qu’il n’a plus revu jusqu’à aujourd’hui. Le FIS, un parti islamiste, remporta un nombre énorme de sièges aux élections locales, et le vote ne fut pas annulé. Entelis explique que le FIS adhérait à une branche modérée de l’islam, comme les Frères musulmans égyptiens ou Ennahda en Tunisie (bien que pour certains, le FIS cherchait à discréditer l’État et saper la constitution). Mais en janvier 1992, évoquant la crainte d’une prise du pouvoir par les islamistes, l’armée annula les élections et renversa le régime. L’Occident, que l’islam politique effrayait également, n’émit que de faibles critiques. Le FIS représentait une menace réelle pour l’État algérien laïc; mais l’armée exploita cette peur pour imposer de nouveau son autorité sur l’État, tout comme l’armée turque le ferait l’année suivante à l’arrivée, par les urnes, d’un parti islamiste modéré au pouvoir. 

La décennie noire 

La Turquie bénéficia d’une deuxième chance avec l’élection du parti actuellement au pouvoir, l’AKP, en 2002; pas l’Algérie. L’échec du shéma libéral raviva les habitudes algériennes de polarisation révolutionnaire. L’armée chassa les élites du FIS et sa base; le parti vola en éclats, certains membres rejoignant l’État et les autres les rangs du terrorisme. Au cours des six années qui suivirent, les deux camps s’engagèrent dans un massacre mutuel qui fit quelque 200 000 victimes—le pire spasme de violence de toute l’histoire convulsive de l’Algérie. La guerre civile des années 1990 a traumatisé le peuple algérien bien plus profondément que la guerre de décolonisation française. Le soulèvement contre la France avait nourri une image de solidarité nationale; la guerre civile poussa activistes et réformateurs algériens les uns contre les autres, et mit en pièces la légitimité révolutionnaire de l’État. 

Le président Abdelaziz Bouteflika, élu pour la première fois en 1999, mit un terme à la guerre. Il promut quelques réformes sociales modérées et toléra une liberté de la presse bien plus grande que celle qui prévalait en Tunisie, par exemple. Il fut reconduit lors d’élections relativement libres en 2004, et son action de modernisation de l’économie et de maîtrise du pouvoir des appareils sécuritaire et des renseignements est reconnue. Il permit aux islamistes, réconciliés avec l’État, d’opérer en plein jour et de se présenter aux élections. Cependant, parce qu’il continuait de consolider la puissance de sa fonction, emprisonnait ses opposants et sapait l’indépendance du parlement et du judiciaire, il en vint à être qualifié «d’autocrate libéral» dans le style de l’égyptien Hosni Moubarak. Et, soumis à un fort taux de chômage et à la hausse des prix, en 2011 les Algériens se sentaient aussi étrangers à l’État que les Égyptiens ou les Tunisiens. La principale différence était qu’ils exprimaient leur frustration plus ouvertement, par des grèves et des critiques publiques du régime, que Bouteflika, comme ses prédécesseurs, tolérait dans certaines limites. 

L'étincelle prend mais... 

Lorsque le Printemps arabe s’est déclenché en janvier dernier, affirme Entelis, les membres de l’opposition algérienne—activistes des droits de l’homme, islamistes, trotskistes—semblaient prêts à passer outre les profondes suspicions mutuelles qui les éloignaient depuis longtemps et qui avaient été exacerbées par la guerre civile. Il pensait, et les activistes algériens espéraient, que 2011 serait l’accomplissement de 1992. En janvier dernier, à l’époque des manifestations en Tunisie et en Égypte, des émeutes de protestation à Alger contre la hausse des prix de l’alimentation et le chômage firent cinq morts et 800 blessés parmi les manifestants. Des manifestations eurent lieu dans toutes les grandes villes du pays. 

Bouteflika réagit avec force, mais fit également preuve d’un esprit de conciliation. En février, le régime leva l’état d’urgence imposé en 1992. En avril, Bouteflika annonça à la télévision des réformes constitutionnelles destinées à «consolider la démocratie», notamment une nouvelle loi électorale. En mai, le gouvernement déclara qu’il allait donner un coup de pouce aux subventions sur la farine, le lait, l’huile alimentaire et le sucre—en plus de l’augmentation de 34% des salaires des fonctionnaires annoncée un peu plus tôt. Il apparut que l’Algérie appartenait à une catégorie à part—plus souple que ses voisins comme la Libye ou l’Égypte, mais aussi assez riche pour, à l’instar de ses voisins du Golfe, apaiser la colère sociale à coups de subsides. Au lieu de prendre de l’ampleur, comme cela a été le cas ailleurs, les protestations en Algérie se sont tassées. 

Le spectre de la guerre civile hante les Algériens 

Les Algériens ne se souviennent que trop bien de leur passé. Des despotes comme le syrien Bachar al-Assad avaient averti que les manifestations allaient déchaîner l’extrémisme—avant de provoquer consciencieusement la réaction violente contre laquelle ils mettaient les peuples en garde. Mais en Algérie, le souvenir de désaccords politiques ayant dégénéré en lutte fratricide était encore bien trop récent. Une forme d’islam relativement modérée avait dégénéré en terrorisme; un vestige du FIS, qui avait fini par rejoindre al Qaeda au Maghreb islamique, demeure une menace pour l’État, aussi distante soit-elle. Par conséquent, si la tradition algérienne de manifester permettait un degré d’activisme interdit ailleurs, la crainte qu’un tel mouvement ne dégénère et que l’armée ne réagisse avec une brutalité meurtrière a fait office de garde-fou du mécontentement populaire. 

Le régime de Bouteflika est engagé lui-même avec le pouvoir, nom donné par les Algériens à l’appareil de sécurité et de renseignements, dans une lutte pour la suprématie dont l’enjeu ultime est le contrôle des revenus du pétrole et du gaz algériens. Entelis avance que les forces réactionnaires du pouvoir ont récemment pris l’avantage. En outre, l’élite dirigeante algérienne semble plus éloignée que jamais du peuple qui s’agite. Profondément effrayé par l’effet domino du Printemps arabe, le régime s’est rangé aux côtés de Mouammar al-Kadhafi pendant la guerre civile libyenne et a été le dernier pays de la région à reconnaître le Conseil national de transition libyen, ébréchant d’autant plus ses références «révolutionnaires.» Les opposants laïcs et islamistes ont appelé Bouteflika à remplacer son Premier ministre actuel avant les élections législatives de mai prochain. Mais pour Entelis, il n’y aura aucun changement, ni évolutionniste, ni révolutionnaire. L’Algérie a tenté les deux, et les deux ont échoué. 

L’histoire de l’Algérie nous met en garde contre la tentation de ranger les événements en catégories. Parce que les mêmes griefs ont donné naissance à des manifestations dans tout le monde arabe, et parce que ces manifestations ont revêtu des formes très similaires d’un pays à l’autre, nous estimons que les résultats seront également les mêmes à chaque fois. Cela ne sera pas le cas, car des histoires différentes ont façonné des cultures politiques distinctes dans chacun de ces pays. L’Algérie nous oblige aussi à reconnaître le poids du passé. L’histoire n’est pas le destin: si l’armée n’avait pas décidé d’intervenir, l’Algérie aurait très bien pu avancer à tâtons jusqu’à la démocratie. La Turquie a pris un chemin, l’Algérie un autre. Mais l’histoire façonne les attentes et les peurs, et conditionne les réactions aux nouveaux événements. Chacun d’entre nous, consciemment ou pas, transporte son passé en lui. 

James Traub 

Foreign Policy 

Traduit par Bérengère Viennot

8 avril 2016

L’opposition a-t-elle cédé la partie ?

 

L’opposition a-t-elle cédé la partie ?

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 Hésitations. Le report de la fameuse réunion au sommet, baptisée «Mazafran II» des  partis engagés dans l’instance de suivi  et de coordination (ISCO) de  la CLTD à la fin du mois de mars prochain, ne dissimule-t-il pas,  une certaine incapacité de ce pan de l’opposition à assurer le minimum ? 

Surtout en cette période où tous les clignotants sont au rouge, ce qui exige d’elle d’être présente aux côtés des populations. Un non-sens, voire une fuite de responsabilité, selon certaines voix, puisque cette même opposition qui soutient détenir une alternative au pouvoir en place qui, certes est acculé, mais reste imperturbable et tient la corde des deux bouts, peine à exister. Celle-ci se contente de réunions organiques pour ressasser les mêmes constats et les mêmes remèdes sans oser sortir sur le terrain pour mettre en branle sa feuille de route politique. Ce report n’est-il pas une preuve de plus de l’échec, encore un autre, de cette opposition hétéroclite avec en son sein, des partis aux programmes  politiques et idéologiques diamétralement opposés. Avec, d’une part, un RCD et El- Adala de Djaballah aux idées qui s’éliminent mutuellement. Il y a encore  cet ex-chef de gouvernement Ali Benflis qui tient mordicus à «l’illégitimité » des institutions, notamment le président de la République, visiblement n’arrivant pas encore à avaler les deux cuisantes défaites subies face au président-candidat. Mais alors, s’interrogent ces mêmes voix, pourquoi cette même opposition n’arrive-t-elle pas à capter l’attention de la rue, surtout que la situation du pays faite de la contraction des recettes pétrolières, y plaide ? Avec un pouvoir qui n’a plus cette capacité de poursuivre l’achat de la paix sociale, tout le monde pensait que le chemin était tout «bitumé» pour l’opposition pour faire valoir son alternative, mais elle ne se contente que de communiqués et de déclarations. Point de meetings et d’activités publiques comme le fait régulièrement la patronne du PT qui n’est pourtant pas membre de l’ICSO alors que celle-ci est attaquée de toutes parts. Un véritable travail de sensibilisation que mène depuis peu Louisa Hanoune au moment où seuls le MSP et le RCD, les gros morceaux de l’ICSO aux côtés du nouveau-né de Benflis qui, de temps à autre, organisent des meetings. C’est que cette ICSO est « minée » par ces personnalités nationales, ces anciens chefs de gouvernement sans aucun relais dans la société, qui ne veulent surtout pas se mouiller, préférant attendre leur heure pour, qui sait, reprendre du service sur un plateau d’argent. Autre indice de cette fuite en avant de l’opposition et de sa soumission au fait accompli, son choix d’organiser son deuxième congrès le 27 mars prochain, soit après le vote de la révision de la Constitution, projet qu’elle dénonce pourtant «de toutes ses forces». Mais du côté des membres de l’ICSO, ils ont leurs propres arguments pour justifier leur «prudence». « Il faut comprendre que les partis de l’opposition, notamment ceux activant au sein de la CLTD, sont des partis responsables et non des pyromanes. Ce sont des partis qui ne veulent pas d’un mouvement violent qui va contester le pouvoir. Nous avons une opposition qui veut aller vers des négociations sur la base d’un projet, celui de la conférence de Mazafran, et discuter avec le pouvoir pour aller vers une transition démocratique pacifique. C’est pour cela que nous demandons l’organisation de marches populaires, car nous considérons que ces manifestations organisées par des partis qui ont de l’expérience dans la gestion des foules, qui ont des capacités à encadrer, à structurer les revendications les plus importantes est mieux qu’une manifestation « spontanée » de jeunes qui en auront marre de la situation et qui voient leurs perspectives d’avenir s’assombrir.», soutient le président du RCD. Et à Mohcine Belabbas de professer «qu’une telle explosion est inévitable si le verrouillage persiste. Elle arrivera par la colère à laquelle on n’a pas su répondre ou à la suite de manipulations de cercles parallèles». Car pour lui, «les choses bougent d’une façon profonde. C’est-à-dire que la conscience citoyenne est de plus en plus importante, on ressent que les Algériens commencent à comprendre qu’ils ont été dupés, que leurs ressources ont été dilapidées et que leur confiance a été trahie. 

Ils commencent à comprendre avec la mise en exergue de la réalité dans les domaines de la gouvernance, de l’économie, et politique. 

Les citoyens se rendent de plus en compte que ce que l’opposition disait est vrai. Donc, les choses évoluent profondément en faveur de l’opposition. Peut-être que ce n’est pas à la cadence souhaitée par beaucoup mais je pense qu’à partir de 2016, 2017, les choses prendront une vitesse très importante et nous nous inquiétons aussi quant à cette vitesse que vont prendre les événements économiques, sociaux et politiques. 

C’est pour cela que l’opposition se prépare à toutes ces éventualités». Un avis que partage le président du MSP. «Je pense que les plus avisés parmi la classe politique, les plus versés dans la pensée et la réflexion, savent très bien que ce qui fait bouger les citoyens et les peuples en général de par le monde, sont les conditions économiques et sociales. Nous n’avons jamais vu dans un pays démocratique qui a des traditions démocratiques, que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis, les citoyens sortir dans la rue et scander des slogans pour la démocratie. 

Les gens sortent dans la rue pour des questions sociales qui les concernent directement. On l’a vu partout de par le monde. Et quand ces gens sentent qu’ils sont lésés dans leurs aspirations, dans leurs conditions économiques et sociales, les partis politiques les écoutent et font de leurs demandes et de leurs aspirations des actions politiques et les développent dans leurs programmes. Et du moment que par le passé, il y avait cette aisance financière, et les Algériens sentaient qu’ils étaient dans des conditions meilleures que beaucoup de pays de la région, ils n’accordaient pas beaucoup de considération à la vie politique. 

Et même quand les partis politiques évoquent la crise en vue, ce ne sont pas tous les Algériens qui y croient et comprennent. Mais lorsqu’ils entreront de plain pied dans cette crise, ils se rappelleront des avertissements de l’opposition. Cela se passe de cette même façon partout dans le monde», soutient Abderezzak Mokri.

 

Larbi Kacel

8 avril 2016

Analyse : Pourquoi l’opposition politique n’arrive-t-elle pas à destituer le régime?

 

Analyse : Pourquoi l’opposition politique n’arrive-t-elle pas à destituer le régime?

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Les analystes   et les experts politiques restent focalisés sur  la stratégie de distribution de l’argent, adoptée par le  pouvoir  pour acheter  la paix sociale, sans  aucun regard critique  sur  le fonctionnement de l’opposition. La concentration du discours sur le pouvoir pour contester ses pratiques autoritaires et sa gestion défaillante n’ont engendré qu’une faible mobilisation pour renforcer les rangs de l’opposition. 

Cette stratégie, qui vise à  renverser  l’équipe dirigeante pour la remplacer par une nouvelle, est considérée comme l’une des raisons principales qui contribue si peu à réduire le fossé  séparant les partis politiques et les populations.  Il faut dire que le régime politique autoritaire s’est maintenu à cause d’une opposition qui a du mal à se détacher d’une culture politique bien ancrée  depuis  le règne du parti unique. 

Au lieu de se démarquer par un discours politique novateur et pragmatique qui précise avec  évaluation objective et arguments matériels l’absence d’une volonté politique pour développer le pays, les partis de l’opposition  reproduisent en permanence  les mêmes phrases générales qui n’embrassent pas les réels problèmes qu’affrontent les Algériens dans leur vie quotidienne. 

Il est vrai que le pouvoir despotique algérien n’a pas arrêté, depuis 1999, de  se renforcer  par la mise en  œuvre de lois  et d’actions policières  pour  verrouiller  toutes les voies qui aident au développement de la démocratie. Mais, cela ne signifie pas que les partis  politiques de l’opposition  ont  perdu  la bataille  de la mobilisation pour trouver de nouveaux moyens pacifiques qui dévoilent le véritable visage de la politique autoritaire. 

En revanche, d’être restée silencieuse ou peu réactive sur plusieurs dossiers graves que la presse a publiés sur la base des investigations des journalistes étrangers n’aident pas l’opposition à gagner la sympathie et à obtenir l’engagement du peuple à ses côtés. Le détournement des sommes colossales  du Trésor public  et l’incapacité de la justice algérienne  à  gagner son autonomie et son pouvoir  pour traiter ces dossiers sensibles  ne doivent pas laisser l’opposition les bras ballants. 

Rebondir à chaque occasion pour attirer l’attention du public  sur  ces dossiers en  réclamant, dans le même temps,  une justice libre et autonome pour  faire  jaillir la vérité et appliquer les lois, anime les esprits et développe le lien politique. 

Aujourd’hui, il est temps d’interpeller le pouvoir autoritaire par un discours politique vivant, qui  élève la voix grâce à un   contenu fructueux,  et qui détaille  les points de faiblesses  des dossiers  sensibles comme  la justice, la santé et l’éducation. 

Repérer  les failles des politiques de formations,  la malfaçon  pour intégrer  socialement  et économiquement les populations ciblées  représentent  un moyen primordial pour  construire  un discours politique moderne,  différent de celui du despote.  Cette stratégie s’opère dans un processus qui aide le parti de l’opposition à s’inscrire plus dans la réalité de la population que dans la réalité du pouvoir autoritaire. 

Il parlera plus des problèmes des catégories sociales différentes que des pratiques nauséabondes du pouvoir autoritaire. Il trouvera tous les moyens nécessaires qui l’aident à sortir de la culture népotique et autoritariste ; et pourra enfin raisonner politiquement. Il aura alors la gloire d’ouvrir le vrai champ politique   pour affaiblir le discours  qui trompe l’œil et  gagnera  sa place parmi la population  qui l’amènera à son tour au  pouvoir afin de réaliser le programme élaboré conformément à sa réalité. 

Dans ce sens, le discours du gouvernant actuel perdra son efficacité pour attirer les masses autour de lui et le parti de l’opposition ne trouvera aucune contrainte pour l’éjecter de son siège, grâce à la popularité qui aura retrouvé son chemin dans son discours novateur.

 L.M.

 

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8 avril 2016

Immanuel Wallerstein : "Le capitalisme est proche de sa fin. La suite ? Porto Alegre ou Davos"

Immanuel Wallerstein : "Le capitalisme est proche de sa fin. 

La suite ? Porto Alegre ou Davos"

 

Les séries d'été de l'Humanité : Penser un monde nouveau. Pour l’historien américain, auteur du concept de système-monde, le capitalisme, comme tout corps naturel et social, n’est pas éternel. Il ne peut survivre en tant que système. 

 

immanuel-wallerstein

Immanuel Wallerstein est une figure incontournable de l’université américaine comme du mouvement altermondialiste. Sur la base des apports de Karl Marx et Fernand Braudel, il a construit une vision du capitalisme sur le long terme dont on peut lire la substance dans son ouvrage The Modern World-System paru en trois tomes (1974, 1980 et 1989). Il y définit le capitalisme comme un « système-monde » dont l’accumulation infinie du capital est la règle première. Dans les années 1970, il réfutait donc la notion de tiers-monde, arguant qu’il n’y avait qu’un seul monde connecté par des relations complexes. Diplômé de Columbia (New York), puis enseignant à Yale, il a également fondé le Centre Fernand-Braudel pour l’étude de l’économie des systèmes historiques et des civilisations de l’université de l’État de New York, à Binghamton. Il fut le président de l’Association internationale de sociologie entre 1994 et 1998. À quatre-vingt-deux ans, il est le président de l’Association des amis de la maison des sciences de l’homme à Paris. Chercheur mais aussi citoyen, Immanuel Wallerstein est signataire du manifeste du Forum social de Porto Alegre intitulé « Douze propositions pour un autre monde possible ». Immanuel Wallerstein continue de livrer ses commentaires sur l’actualité (http://www.binghamton.edu/fbc/commentaries). 

Pour en savoir plus : http://www.iwallerstein.com 

À lire : Comprendre le monde. Introduction à l’analyse du système-monde et le capitalisme historique, (Éditions La Découverte). 

Comment voyez-vous le capitalisme fonctionner depuis son émergenceil y a cinq cents ans ? 

Immanuel Wallerstein. Je définis le capitalisme comme l’accumulation infinie de capital et je mets l’accent sur le mot « infinie ». C’est un système où la règle est l’accumulation du capital, et ceux qui ne la respectent pas sont éjectés. Cela a été un grand succès depuis cinq cents ans. L’accumulation a bien marché pour un petit groupe. 

Comment le capitalisme a-t-il accumulé du capital ? La façon supposément évidente est celle du marché. Or ledit marché n’est pas amical pour le capitalisme. Il s’avère au contraire dévastateur. Ce qui permet l’accumulation est une situation de quasi-monopole, difficile à obtenir mais elle l’est toujours avec l’aide significative de l’État. Il n’y a pas d’autres moyens. Le capitalisme n’a jamais été contre l’État, pas plus aujourd’hui qu’hier ou que demain. Une fois atteint l’objectif, un autre problème se pose, les quasi-monopoles s’entre-dévorent… L’histoire a commencé il y a cinq cents ans et a duré jusqu’aux années 1970 avec le passage d’un capitalisme de quasi-monopole à un capitalisme de compétition qui est destructeur. Ils tentent donc, désormais, de recréer des quasi-monopoles. 

Autre constante du capitalisme : en situation de quasi-monopole, vous ne pouvez pas amasser beaucoup d’argent dans un contexte de désordre généralisé. Un certain nombre de désordres peuvent être tolérés mais pas une situation générale de désordre. Les guerres sont mauvaises pour le capitalisme. Certes, certains capitalistes font de l’argent avec mais elles sont globalement destructrices de capital. Vous avez donc besoin d’une puissance hégémonique qui minimise les risques et stabilise les situations. Sauf que les puissances hégémoniques elles-mêmes s’autodétruisent. Pour tout un tas de raisons. D’abord parce qu’elles reposent sur la puissance militaire. La menace constitue, pour elles, un atout à condition de ne pas être utilisée. L’utilisation militaire mine les puissances pour une raison assez simple : les puissances hégémoniques ne peuvent jamais utiliser leur capacité militaire comme elles l’entendent. Cela donne donc des idées à d’autres forces qui veulent les défier. Tout cela, non plus, n’est pas nouveau. 

Enfin, un dernier point : un capitaliste possède deux moyens de faire de l’argent : minimiser les coûts et maximaliser les prix, ce qui dépend, pour le second objectif, du contexte et d’une situation, ou pas, de quasi-monopole. 

 Commençons par les techniques de minimalisation des coûts... 

Immanuel Wallerstein. Elles sont au nombre de trois. La première concerne le personnel, à partir des trois catégories : ceux qui ne sont pas formés et qui touchent le salaire minimum ou moins ; ceux qui ont un niveau intermédiaire et qui disposent d’un niveau de vie raisonnable ; enfin il y a le 1 % qui mène la danse. Il existe plein de techniques pour compresser ces coûts mais la principale réside dans le déménagement d’entreprises. C’est une technique standard non pas depuis vingt-cinq ans mais depuis cinq cents ans. 

Autre technique : faire venir des paysans pour travailler dans des usines. C’est, dans un premier temps, une sorte de gagnant-gagnant. Le capitaliste paie moins de salaire et le paysan gagne plus en tant qu’ouvrier. Puis, après un temps de désorientation, le nouvel ouvrier apprend, s’engage et demande des augmentations de salaire. Retour pour le capitaliste à la technique standard : déménager. Si vous faites cela pendant cinq cents ans, vous commencez à sérieusement épuiser, en termes de main-d’œuvre potentielle, les zones rurales. 

Vient ensuite le coût lié à la matière première du produit. Il est une chose que les capitalistes n’aiment pas faire : payer la note. Donc, ils jettent les produits toxiques dans la rivière. C’est une façon d’externaliser la toxicité. Mais si vous faites cela pendant cinq cents ans, vous avez épuisé aussi les rivières. En gros, vous utilisez les ressources mais ne payez pas pour leur renouvellement, vous coupez les arbres mais vous ne les replantez pas. 

Troisième coût : les impôts que vous devez payer à quelqu’un. En 1912, Rockefeller payait 2 à 3 % d’impôts. Il en paie plus aujourd’hui même s’il ne le sait pas. Si on regarde à la bonne échelle, sur cinq cents ans, la note des impôts a augmenté pour les capitalistes. 

Les capitalistes ont toujours essayé de réduire les coûts mais, lorsque vous regardez sur le long terme, vous vous apercevez qu’ils n’arrivent jamais à revenir au niveau de coût qui existait dans le cycle précédent. Rockefeller paie moins d’impôts qu’il y a trente ans mais beaucoup plus qu’il y a un siècle. 

On entend parler de crises et de financiarisation comme de phénomènes relativement nouveaux. Qu’en pensez-vous ? 

Immanuel Wallerstein. Financiarisation ? C’est le plus vieux nom du « jeu » capitaliste. Il n’y a vraiment rien de nouveau. C’est comme la « crise ». Il y a des hauts et des bas dans tout processus social. Comme les gens, un système respire, inspire, expire. 

La crise systémique que je décris aujourd’hui ne signifie pas qu’il y a des hauts et des bas mais que le capitalisme ne peut survivre en tant que système. Il ne peut plus se reproduire sur le mécanisme qui est le sien depuis plus de cinq cents ans. Ce qui se passe depuis les années 1970, c’est la fin d’un cycle B de Kondratieff (phase descendante après une phase A de longue durée de développement et de croissance – NDLR). On a épuisé totalement toutes les ressources y compris les débiteurs. On court d’explosion de bulle en explosion de bulle. En 2008, les gens se sont rendu compte de ce phénomène. Même si la Bourse a retrouvé son niveau d’avant le déclenchement de la crise, nous sommes toujours dans une phase de récession car, pour moi, la seule mesure valable pour juger de la sortie de crise ou non, c’est le niveau du chômage. Nous ne sommes certainement pas près d’en sortir, puisque les politiques d’austérité ne fonctionnent pas. Économiquement et politiquement. 

 Accumulation, compression des coûts, financiarisation, « crises » : le capitalisme fonctionne ainsi depuis cinq cents ans. Ce qui est nouveau, selon vous, est que ce système arrive à sa fin. 

Immanuel Wallerstein. Tous les systèmes ont une vie. C’est vrai du plus petit système dans la nature jusqu’à l’univers. Ce qui est vrai des organismes l’est aussi des systèmes sociaux. Ils ne sont pas éternels. Il en est de même pour le capitalisme, système-monde depuis cinq siècles qui a été plutôt prospère. Il a atteint le point d’une crise systémique. Il ne peut pas survivre. C’est juste un constat, pas l’expression d’un désir. 

Depuis, au moins les années 1970, le système est entré dans une période de chaos. Qu’est-ce qui caractérise une situation chaotique ? Le fait que les hauts et les bas sont incontrôlés et d’ampleurs inégalées. Cela va certainement encore durer plusieurs décennies. Le capitalisme se trouve à un point de bifurcation. Il y a deux routes pour sortir de là. L’alternative peut se résumer ainsi : l’esprit de Davos ou l’esprit de Porto Alegre. Je m’explique. L’esprit de Davos, cela signifie un nouveau système qui n’est pas capitaliste mais qui reprend les trois caractéristiques du capitalisme (impérialisme, exploitation, polarisation). Il n’y a pas qu’une seule façon, le capitalisme, de faire cela. Vous savez, les capitalistes ne veulent plus du capitalisme car il ne leur permet plus d’engranger des profits assez substantiels. Les capitalistes veulent la fin du capitalisme autant que nous. L’esprit de Porto Alegre, c’est la marche vers un système relativement égalitaire et relativement démocratique. Je dis relativement car, il n’y a dans le monde aucun État réellement démocratique comme il n’en a jamais existé dans l’histoire. 

Il faut bien voir que ces deux groupes sont divisés sur la tactique à adapter. Dans le groupe de Davos, il y a les adeptes du Tapez-leur sur la tête et ceux, plus sophistiqués, qui pensent que ça ne marche pas et qu’il faut tout changer pour que rien ne change. On trouve dans cette dernière catégorie les adeptes du capitalisme vert. Les disputes dans la presse entre George Soros (milliardaire et spéculateur – NDLR) et Dick Cheney (ancien vice-président de W. Bush – NDLR) reflètent cela. 

Dans le groupe de Porto Alegre, il y a aussi un grand débat : un groupe parie sur les mouvements, les diversités sans organisation centrale, un autre avance que si vous n’avez pas de pouvoir politique, vous ne pouvez rien changer. Tous les gouvernements d’Amérique latine ont ce débat. 

Ce qui est certain, c’est qu’en 2050 nous vivrons dans un autre système. Il peut être incroyablement pire comme meilleur que le système dans lequel nous vivons actuellement. Je dirais que c’est du 50-50, ce qui est plutôt une bonne cote… Cela peut déboucher sur un nouveau système-monde comme sur une multitude de petits systèmes comme ce fut le cas dans la majeure partie de l’histoire de l’humanité. L’existence d’un système-monde est très récente. 

 Qu’est-ce qui peut déterminer le résultat du processus que vous décrivez comme étant en cours ? 

Immanuel Wallerstein. Il y a trois impondérables : la crise environnementale, les pandémies, une guerre nucléaire. Les trois sont enracinées dans le capitalisme mais les trois ont désormais leur propre existence. Détaillons-les. 

La crise environnementale. Toutes les productions, quelles qu’elles soient, créent de la toxicité. Toutes. La question est de savoir ce que vous en faites. Le système capitaliste a décidé de la jeter à la rivière. Littéralement, comme je l’ai déjà dit. Au bout de cinq cents ans, cela rend les rivières plutôt impraticables pour les poissons et les hommes. Il faut alors nettoyer cela. C’est le rôle dévolu au gouvernement. Il faut de l’argent pour cela, et cet argent vient de la taxation. Jusqu’au point où l’on demande au capitaliste d’internaliser ce coût. Si je le fais, dit-il, je ne peux pas faire de profits. Il a absolument raison. Voilà pourquoi, de ce point de vue, il n’y a pas de sortie dans le cadre du système. Le changement climatique est la facette la plus dramatique de cette crise et personne ne peut vraiment dire la tournure qu’il peut prendre. Comme personne ne peut vraiment dire ce que certaines pandémies peuvent devenir. 

Enfin, les armes nucléaires. D’ici dix ans, nous aurons vingt-cinq puissances nucléaires dans le monde. Au moins. Les États-Unis n’ont plus le pouvoir de stopper cela. Nous sommes dans une situation géopolitique chaotique avec dix ou douze centres de pouvoir à l’échelle de la planète. Par ailleurs, je ne crois pas que nous soyons à l’abri d’un scénario à la Docteur Folamour. 

Nous connaissons les impondérables mais nous ne connaissons pas leur timing. Si l’un d’eux surgit avant la fin du processus de bifurcation, cela affectera le résultat. J’oubliais le dernier des impondérables : l’action de chacun qui peut, comme un effet papillon, changer l’ensemble du processus. 

Aucune certitude quant à l’avenir ? 

Immanuel Wallerstein. En Amérique du Sud, ils parlent beaucoup en ce moment du buen vivir, qui vient du quechua sumak kawsay. Que dit cette pensée ? Que la croissance est cancéreuse, pas vertueuse. Ça, c’est une certitude. 

Petite histoire. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le Danemark était un petit pays pauvre. Il a pris la décision de se développer et ça a marché : il est en tête de toutes les mesures possibles de développement. Cela a coûté très cher. Mais si le monde entier voulait devenir le Danemark, ce ne serait pas possible en termes de ressources. Si nous voulons survivre en tant que civilisation, nous aurons à revenir sur nos standards de vie. Surtout dans les endroits où ils sont hauts. Nous sommes face à un changement civilisationnel. Il nous faut choisir quelles réalités nous voulons préserver et quelles autres nous voulons jeter par-dessus bord.

8 avril 2016

"Le capitalisme touche à sa fin"

 

"Le capitalisme touche à sa fin" 

 

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LE MONDE | 16.12.2008 

Monde.fr 

Signataire du manifeste du Forum social de Porto Alegre ("Douze propositions pour un autre monde possible"), en 2005, vous êtes considéré comme l'un des inspirateurs du mouvement altermondialiste. Vous avez fondé et dirigé le Centre Fernand-Braudel pour l'étude de l'économie des systèmes historiques et des civilisations de l'université de l'Etat de New York, à Binghamton. Comment replacez-vous la crise économique et financière actuelle dans le "temps long" de l'histoire du capitalisme ? 

Im manuel Wallerstein : Fernand Braudel (1902-1985) distinguait le temps de la "longue durée", qui voit se succéder dans l'histoire humaine des systèmes régissant les rapports de l'homme à son environnement matériel, et, à l'intérieur de ces phases, le temps des cycles longs conjoncturels, décrits par des économistes comme Nicolas Kondratieff (1982-1930) ou Joseph Schumpeter (1883-1950). Nous sommes aujourd'hui clairement dans une phase B d'un cycle de Kondratieff qui a commencé il y a trente à trente-cinq ans, après une phase A qui a été la plus longue (de 1945 à 1975) des cinq cents ans d'histoire du système capitaliste. 

Dans une phase A, le profit est généré par la production matérielle, industrielle ou autre ; dans une phase B, le capitalisme doit, pour continuer à générer du profit, se financiariser et se réfugier dans la spéculation. Depuis plus de trente ans, les entreprises, les Etats et les ménages s'endettent, massivement. Nous sommes aujourd'hui dans la dernière partie d'une phase B de Kondratieff, lorsque le déclin virtuel devient réel, et que les bulles explosent les unes après les autres : les faillites se multiplient, la concentration du capital augmente, le chômage progresse, et l'économie connaît une situation de déflation réelle. 

Mais, aujourd'hui, ce moment du cycle conjoncturel coïncide avec, et par conséquent aggrave, une période de transition entre deux systèmes de longue durée. Je pense en effet que nous sommes entrés depuis trente ans dans la phase terminale du système capitaliste. Ce qui différencie fondamentalement cette phase de la succession ininterrompue des cycles conjoncturels antérieurs, c'est que le capitalisme ne parvient plus à "faire système", au sens où l'entend le physicien et chimiste Ilya Prigogine (1917-2003) : quand un système, biologique, chimique ou social, dévie trop et trop souvent de sa situation de stabilité, il ne parvient plus à retrouver l'équilibre, et l'on assiste alors à une bifurcation. 

La situation devient chaotique, incontrôlable pour les forces qui la dominaient jusqu'alors, et l'on voit émerger une lutte, non plus entre les tenants et les adversaires du système, mais entre tous les acteurs pour déterminer ce qui va le remplacer. Je réserve l'usage du mot "crise" à ce type de période. Eh bien, nous sommes en crise. Le capitalisme touche à sa fin. 

Pourquoi ne s'agirait-il pas plutôt d'une nouvelle mutation du capitalisme, qui a déjà connu, après tout, le passage du capitalisme marchand au capitalisme industriel, puis du capitalisme industriel au capitalisme financier ? 

Le capitalisme est omnivore, il capte le profit là où il est le plus important à un moment donné ; il ne se contente pas de petits profits marginaux ; au contraire, il les maximise en constituant des monopoles - il a encore essayé de le faire dernièrement dans les biotechnologies et les technologies de l'information. Mais je pense que les possibilités d'accumulation réelle du système ont atteint leurs limites. Le capitalisme, depuis sa naissance dans la seconde moitié du XVIe siècle, se nourrit du différentiel de richesse entre un centre, où convergent les profits, et des périphéries (pas forcément géographiques) de plus en plus appauvries. 

A cet égard, le rattrapage économique de l'Asie de l'Est, de l'Inde, de l'Amérique latine, constitue un défi insurmontable pour "l'économie-monde" créée par l'Occident, qui ne parvient plus à contrôler les coûts de l'accumulation. Les trois courbes mondiales des prix de la main-d’œuvre, des matières premières et des impôts sont partout en forte hausse depuis des décennies. La courte période néolibérale qui est en train de s'achever n'a inversé que provisoirement la tendance : à la fin des années 1990, ces coûts étaient certes moins élevés qu'en 1970, mais ils étaient bien plus importants qu'en 1945. En fait, la dernière période d'accumulation réelle - les "trente glorieuses" - n'a été possible que parce que les Etats keynésiens ont mis leurs forces au service du capital. Mais, là encore, la limite a été atteinte ! 

Y a-t-il des précédents à la phase actuelle, telle que vous la décrivez ? 

Il y en a eu beaucoup dans l'histoire de l'humanité, contrairement à ce que renvoie la représentation, forgée au milieu du XIXe siècle, d'un progrès continu et inévitable, y compris dans sa version marxiste. Je préfère me cantonner à la thèse de la possibilité du progrès, et non à son inéluctabilité. Certes, le capitalisme est le système qui a su produire, de façon extraordinaire et remarquable, le plus de biens et de richesses. Mais il faut aussi regarder la somme des pertes - pour l'environnement, pour les sociétés - qu'il a engendrées. Le seul bien, c'est celui qui permet d'obtenir pour le plus grand nombre une vie rationnelle et intelligente. 

Cela dit, la crise la plus récente similaire à celle d'aujourd'hui est l'effondrement du système féodal en Europe, entre les milieux du XVe et du XVIe siècle, et son remplacement par le système capitaliste. Cette période, qui culmine avec les guerres de religion, voit s'effondrer l'emprise des autorités royales, seigneuriales et religieuses sur les plus riches communautés paysannes et sur les villes. C'est là que se construisent, par tâtonnements successifs et de façon inconsciente, des solutions inattendues dont le succès finira par "faire système" en s'étendant peu à peu, sous la forme du capitalisme. 

Combien de temps la transition actuelle devrait-elle durer, et sur quoi pourrait-elle déboucher ? 

La période de destruction de valeur qui clôt la phase B d'un cycle Kondratieff dure généralement de deux à cinq ans avant que les conditions d'entrée dans une phase A, lorsqu'un profit réel peut de nouveau être tiré de nouvelles productions matérielles décrites par Schumpeter, sont réunies. Mais le fait que cette phase corresponde actuellement à une crise de système nous a fait entrer dans une période de chaos politique durant laquelle les acteurs dominants, à la tête des entreprises et des Etats occidentaux, vont faire tout ce qu'il est techniquement possible pour retrouver l'équilibre, mais il est fort probable qu'ils n'y parviendront pas. 

Les plus intelligents, eux, ont déjà compris qu'il fallait mettre en place quelque chose d'entièrement nouveau. Mais de multiples acteurs agissent déjà, de façon désordonnée et inconsciente, pour faire émerger de nouvelles solutions, sans que l'on sache encore quel système sortira de ces tâtonnements. 

Nous sommes dans une période, assez rare, où la crise et l'impuissance des puissants laissent une place au libre arbitre de chacun : il existe aujourd'hui un laps de temps pendant lequel nous avons chacun la possibilité d'influencer l'avenir par notre action individuelle. Mais comme cet avenir sera la somme du nombre incalculable de ces actions, il est absolument impossible de prévoir quel modèle s'imposera finalement. Dans dix ans, on y verra peut-être plus clair ; dans trente ou quarante ans, un nouveau système aura émergé. Je crois qu'il est tout aussi possible de voir s'installer un système d'exploitation hélas encore plus violent que le capitalisme, que de voir au contraire se mettre en place un modèle plus égalitaire et redistributif. 

Les mutations antérieures du capitalisme ont souvent débouché sur un déplacement du centre de "l'économie-monde", par exemple depuis le Bassin méditerranéen vers la côte Atlantique de l'Europe, puis vers celle des Etats-Unis ? Le système à venir sera-t-il centré sur la Chine ? 

La crise que nous vivons correspond aussi à la fin d'un cycle politique, celui de l'hégémonie américaine, entamée également dans les années 1970. Les Etats-Unis resteront un acteur important, mais ils ne pourront plus jamais reconquérir leur position dominante face à la multiplication des centres de pouvoir, avec l'Europe occidentale, la Chine, le Brésil, l'Inde. Un nouveau pouvoir hégémonique, si l'on s'en réfère au temps long braudélien, peut mettre encore cinquante ans pour s'imposer. Mais j'ignore lequel. 

En attendant, les conséquences politiques de la crise actuelle seront énormes, dans la mesure où les maîtres du système vont tenter de trouver des boucs émissaires à l'effondrement de leur hégémonie. Je pense que la moitié du peuple américain n'acceptera pas ce qui est en train de se passer. Les conflits internes vont donc s'exacerber aux Etats-Unis, qui sont en passe de devenir le pays du monde le plus instable politiquement. Et n'oubliez pas que nous, les Américains, nous sommes tous armés... 

LE MONDE | 16.12.2008

7 avril 2016

Algérie : Affaire Bouchouareb... le pouvoir au pied du mur!

 

Chakib Khelil

Chakib Khelil (arabe : شكيب خليل), né à Oujda , au Maroc le 8 août 1939 (1), est un homme politique algérien. Cet ex-ministre de l'énergie et plusieurs de ses proches font l'objet d'un mandat d'arrêt international dans le cadre du scandale de corruption de laSonatrach, a annoncé lundi 12 août 2013 le procureur général près la cour d'Alger, Belkacem Zeghmati. Selon la presseitalienne, la justice italienne chercherait à saisir 123 millions de dollars (92,6 millions d'euros) déposés sur des comptes appartenant à M. Bedjaoui, qui serait basé à Dubaï2.

Affaire Bouchouareb... le pouvoir au pied du mur!

Pour les amis ,les camarades et les freres de combat qui veulent écouter mon intervention sur Al Magharibia du 5 Avril portant sur les nouvelles révélations de dilapidation des biens du peuple par la maffia ploutocratique criminelle.

Essaid Aknine

5 avril 2016

Algérie : Guerre de libération nationale : Il y a 60 ans Henri Maillot s’emparait d’un camion d’arme

 

Algérie : Guerre de libération nationale :

Il y a 60 ans Henri Maillot s’emparait d’un camion d’arme

 

Abane Ramdane

 

Bachir Hadj-Ali

 

Rencontres et accords FLN-PCA 

lundi 4 avril 2016 

par Alger républicain 

Guerre de libération nationale :

il y a 60 ans Henri Maillot s’emparait d’un camion d’armes 

Rencontres et accords FLN-PCA

A l’occasion de la commémoration de l’acte héroïque du martyr Maillot, nous mettons en ligne l’article rédigé par Sadek Hadjerès en avril 2006 à la demande d’Alger républicain. 

L’ancien dirigeant du Parti communiste algérien relate avec minutie les circonstances dans lesquelles fut menée cette opération. Son récit clarifie les raisons qui poussèrent la direction du PCA à prendre la décision de créer les Combattants de la Libération. Le retentissement de l’action de Maillot poussa la direction du FLN à se départir de son refus du contact demandé depuis des mois par le PCA pour organiser l’intégration des militants communistes dans les groupes armés et exposer la conception des communistes concernant la stratégie de mobilisation et de coordination de la lutte pour la libération nationale. 

Le PCA avait une autre conception du front. Il défendait son droit en tant que parti de la classe ouvrière à maintenir son existence organique, politique et idéologique indépendante, tout en agissant pour la fusion de façon concertée de ses groupes armés dans l’Armée de Libération Nationale en tant qu’armée unique face au colonialisme ; tout en soutenant également l’action politique menée par le FLN au plan national et international pour l’indépendance de l’Algérie. Le PCA ne s’empêchait cependant pas de critiquer par des voies non publiques les erreurs commises ou les conceptions de classe nuisibles à la mobilisation des masses et à l’image de la guerre de libération. Partant de ses objectifs démocratiques et socialistes de l’indépendance de l’Algérie il avait refusé avec fermeté de se dissoudre en tant que parti dans le FLN. L’histoire des événements qui s’ensuivirent à l’indépendance lui donna entièrement raison. 

La prise du camion d’armes eut pour résultat immédiat la tenue d’une rencontre entre Abane et Benkhedda pour le FLN et Hadj Ali et Hadjerès pour le PCA.

 NB : la publication des témoignages de Sadek Hadjerès sur l’action du PCA avant l’indépendance ne signifie pas que nous souscrivons à ses appréciations d’aujourd’hui sur les problèmes de l’Algérie devenue indépendante.

 .AR 

04.04.16 

_________________________

J’ai évoqué dans deux articles du début avril de cette année, l’action du 4 avril 1956 menée par le militant communiste algérien Henri Maillot. Avec un groupe de CDL (Combattants de la Libération), il s’était emparé d’un camion d’armement au profit de la Résistance. L’action avait eu aussitôt un impact considérable. Il était mesurable dans les conversations directes ou par allusions parmi les jeunes, les militants, les familles, dans tous les milieux. Dans ses grands titres, la presse coloniale déchaînée criait à « la trahison de l’aspirant félon ». L’effet était exactement inverse, au plus profond des composantes patriotiques de l’opinion algérienne. Dans ces milieux, les réactions respiraient la fierté du coup porté au colonialisme matériellement et au plan moral. La volonté de contribuer au combat libérateur, quels que soient les sacrifices, se trouvait renforcée parce que, aux yeux de nombre de nos compatriotes, cette cause était partagée en actes par des hommes que leur origine n’obligeait pas, à première vue, à un engagement aussi extrême. 

Plus tard, en juin, quand les gens apprirent l’assassinat de Maillot par les troupes françaises après l’accrochage de Beni Boudouane, ce sentiment sera ressenti d’une façon encore plus ancrée dans la culture et la psychologie populaires. Un camarade, hospitalisé pour deux jours avant son retour au maquis de Bouinan, me dit qu’autour de lui dans la salle ou dans les allées de l’hôpital Mustapha, les malades exprimaient leur peine et leur respect : « Il est plus musulman que nous, il mérite mieux que nous sa place « fel Djenna » (au Paradis) ! Comme le dira si bien Simon, son futur beau-frère, lui-même un des clandestins du PCA et des CDL d’Oran : « Les uns vouaient Henri à l’Enfer des maudits et les autres le voyaient, martyr, au Paradis. » 

Maillot, quant à lui, avait indiqué dès le début la signification politique et sociale de son action. Il disait, dans le communiqué signé de lui et adressé aux agences et organes de presse (sa publication en France par l’Humanité, organe du PCF, a valu à ce journal la saisie de son numéro du 18 avril 1956) : « L’écrivain français Jules Roy, colonel d’aviation, écrivait il y a quelques mois : si j’étais musulman, je serais du côté des « fellagas ». Je ne suis pas musulman, mais je suis algérien, d’origine européenne. 

Je considère l’Algérie comme ma patrie. Je considère que je dois avoir à son égard les mêmes devoirs que tous ses fils. Le peuple algérien, longtemps bafoué, humilié, a pris résolument sa place dans le grand mouvement historique de libération des peuples… 

Il ne s’agit pas d’un combat racial, mais d’une lutte d’opprimés, sans distinction d’origine, contre leurs oppresseurs et leurs valets sans distinction de race… En livrant aux combattants algériens des armes dont ils ont besoin pour le combat libérateur, j’ai conscience d’avoir servi les intérêts de mon pays et de mon peuple, y compris ceux des travailleurs européens momentanément trompés. » 

En soulignant dans ce message le besoin d’armes des combattants, Maillot était au cœur des vives préoccupations de cette période critique. La question était brûlante, tant pour les milliers de jeunes, impatients de rejoindre le djebel ou qui s’y trouvaient déjà, que pour les dirigeants du FLN. A l’afflux des combattants volontaires, il fallait des armes en plus grand nombre. Nous savons, aujourd’hui, par les lettres échangées de 1954 à 1956 entre Alger et le Caire, que c’était un sujet de tension entre les dirigeants FLN. 

Ceux qui se trouvaient au Caire étaient perçus à tort ou à raison par ceux de l’intérieur ou par les maquisards à la base comme manquant à leurs tâches d’assurer un approvisionnement satisfaisant en armes (cf Le Courrier Alger-Le Caire, ouvrage de Mabrouk Belhocine, aux éditions Casbah, 2000). 

En avril 1956, nous ne connaissions pas les tensions qui existaient à ce niveau. Mais de divers côtés nous parvenaient les échos lancinants de cette attente fiévreuse d’armement. 

Nous ne fûmes donc pas surpris de recevoir rapidement dans les jours qui ont suivi le succès de l’opération, une réponse positive des dirigeants du FLN, sur le principe d’une rencontre dès que possible. Nous leur avons laissé le soin d’en proposer la date et les modalités. 

Avant la rencontre 

En attendant, nous apprenions par divers indices que malgré la sympathie soulevée dans la population par l’action de Maillot (ou à cause de cela), des interrogations se manifestaient parmi les cadres du FLN. Elles allaient de l’inquiétude jusqu’à une certaine nervosité frisant la méfiance et l’hostilité chez les plus hégémonistes d’entre eux. Ce sentiment était sans doute alimenté, également, par leur irritation envers les comportements qu’ils jugeaient hostiles des courants messalistes à leur égard. Nous avons voulu dissiper toute équivoque sur nos intentions et confirmer que la prise des armes ne changeait rien aux orientations unitaires proclamées par le PCA depuis novembre 1954. Nous leur avons fait savoir, à travers la liaison qui nous avait permis de prendre contact, notre décision de remettre dès avant la rencontre une dizaine de mitraillettes aux unités de l’ALN. 

L’opération fut réalisée. Il n’était pas facile en cette deuxième quinzaine d’avril, avec nos sympathisants très surveillés et dans une Mitidja étroitement quadrillée, de protéger et gérer le stock d’armement capturé. Amar Ouamrane, qui commandait l’ALN dans l’Algérois, nous a transmis ses remerciements. J’ai appris ces dernières années que le commandant Lakhdar Bouregâa avait évoqué en termes élogieux et fraternels les contacts qu’il a eus à l’époque de cet épisode avec les groupes communistes (non encore intégrés à l’ALN) dans la région de Bouinan Hammam Melouane (cf ses Mémoires, en langue arabe, aux éditions Al-Hikma, 1990 ; au point 5, sous-titré « patrouille (daouria) de héros et l’amitié avec les communistes »). « Je te jure, avait-il confié au milieu des années 1990 à notre camarade Haydar Hassani, que les premières balles de mitraillette que j’ai tirées nous provenaient de l’armement des communistes, plus précisément de Henri Maillot, Allah yrahmou. » 

Fin avril ou début mai 1956, on me communiqua le lieu prévu pour la rencontre, le cabinet de dentiste du Dr Mokrane Bouchouchi, rue d’Isly, place Bugeaud (aujourd’hui Ben M’hidi, place Emir Abdelkader). Ce choix par les amis du FLN me réjouit ; il montrait que la coopération sur le terrain entre FLN et communistes à la base était déjà avancée. Car Bouchouchi, comme d’autres médecins, sympathisait avec le PCA et versait aux souscriptions qui me parvenaient par l’intermédiaire de Leila A., une jeune militante du cercle des jeunes UJDA de Belcourt. 

Je me contenterai ici de relater quelques points sur le contenu de cette rencontre. Je les compléterai en d’autres occasions par des faits tout aussi significatifs des évolutions ultérieures. Les lecteurs intéressés pourront trouver d’autres détails sur cette rencontre et les suivantes qui se poursuivront jusque fin août dans plusieurs entretiens que j’ai donnés durant ma seconde clandestinité : 

à Henri Alleg dans les années 1970 (3 tomes de La Guerre d’Algérie, Temps Actuels, 1981), puis à Hafidh Khatib dans les années 1980 (L’accord FLN-PCA…, OPU, 1991) et, enfin, quelques échos dans l’ouvrage important du regretté Mohammed Teguia, avec qui son exil puis sa mort prématurée n’ont pas permis d’engager les entretiens que nous avions projetés ensemble. 

Les deux publications citées contiennent également le texte des lettres adressées au FLN dans lesquelles sont consignés les thèmes de nos échanges et les points sur lesquels se sont réalisés des accords. 

Démarrage incertain 

Benkhedda, je le connaissais sans avoir vraiment milité avec lui. Dans les années quarante, nous avions, entre autres, travaillé dans le studio d’un militant à un montage photographique pour un mémorandum du MTLD à l’ONU, illustrant la pratique des tortures colonialistes. Ensuite, nous nous sommes surtout opposés lors de la déplorable crise du PPA-MTLD de 1949, faussement attribuée par lui — et par la presse colonialiste — à un « séparatisme » kabyle. 

Quant à Abbane, après l’avoir salué chaleureusement, il semblait curieux de savoir si je l’avais ou non reconnu, ce que je lui ai confirmé. Il n’avait pas changé de visage et d’allure depuis le début des années quarante, quand il était, comme Yazid, Ali Boumendjel, Benkhedda et Dahleb dans les classes supérieures du collège de Blida où j’étais entré en 5e. Je connaissais néanmoins et appréciais son itinéraire dans le MTLD et l’OS, car Mabrouk Belhocine m’en avait parlé à la fin des années quarante. 

Benkhedda, avec sa civilité et sa politesse habituelles, nous félicite d’abord pour l’action menée et nous remercie sincèrement au nom du FLN pour la première livraison d’armes. Abbane écoutait et approuvait avec le front plissé et l’air concentré que je lui connaissais, puis rapidement, il commença à bouillonner, impatient d’en arriver au cœur du sujet. Il interrompit Benkhedda en nous tendant une carte d’identité, celle d’Abdelkader Choukal, journaliste d’Alger républicain, monté au maquis avec d’autres camarades dans les monts de Tablat et Beni Misra : « On ne veut plus de ces choses-là… Les communistes veulent noyauter le mouvement… C’est la même chose pour Laïd Lamrani dans les Aurès… Qu’est-ce qu’il a, à proposer d’éditer des bulletins intitulés « El-Watani » (le Patriote) et d’autres propagandes… ? » 

Son intervention nous sembla un mélange de protestation sincère et de mise en scène voulue. Nous avons mis calmement les choses au point. Bachir Hadj Ali a souligné : « Nous ne sommes pas venus les uns et les autres pour nous chamailler. La décision de nous rencontrer signifie que nous souhaitons de part et d’autre trouver des réponses à nos préoccupations communes. » 

Puis Bachir et moi, tour à tour et en réagissant aussi à leurs remarques et questions, nous avons précisé, en substance : « Nos camarades, comme tous les Algériens, veulent se battre ; ils rejoignent la montagne ou les réseaux urbains, c’est naturel. 

Nos camarades, depuis le début de l’insurrection, n’ont que deux choix compatibles avec leurs convictions : ou bien aller directement à l’ALN, là où ils trouvent une porte ouverte et des garanties de bon accueil et nous les y encourageons, ou bien, en attendant, nous les aidons à constituer eux-mêmes leurs propres groupes armés et ceux-là sont impatients qu’on règle les modalités de leur intégration dans la clarté. 

Doivent-ils attendre comme des moutons de se faire arrêter et neutraliser par les colonialistes ? Vous les accuseriez alors de se dérober à leur devoir. 

Nous regrettons que certains fassent courir ces bruits alors qu’en même temps ils font tout pour les empêcher de combattre. Nous avons constitué des groupes dans les villes et dans les campagnes, nous n’en faisons pas un secret avec vous. » 

Et à ce propos, nous avons fourni des précisions sur leur composition, leur localisation, etc. Et avons insisté : « Notre parti et nos militants ne sont pas des aventuriers ou des intrigants. Nous sommes venus pour discuter, fraternellement et politiquement, des différents problèmes que ça peut poser. 

Nous ne voyons aucun intérêt à « noyauter » vos organisations, ni pour nous-mêmes ni surtout pour notre cause commune. 

Nous souhaitons élaborer ensemble des formules concrètes de coopération, s’il y a des incompréhensions, le moment est venu d’en parler. Nous avons fait des multiples tentatives d’en discuter directement, mais sans résultat. » 

Sur ce dernier point, j’avais énuméré quelques contacts que j’avais eus depuis novembre 1954 pour tenter de joindre leurs dirigeants par la Mitidja, la Kabylie, Alger ou El-Harrach, à travers des militants et amis que je savais proches d’eux. Parmi eux Saïd Akli, qui ne me cachait pas ses contacts directs et quasi permanents avec Krim, Abbane, Ouamrane, Fernane, etc. (c’était aussi le cas avant 1950 avec Ben Bella). Ou encore Mohammed Fellous dont j’ai appris, bien après l’indépendance, qu’il avait été un proche collaborateur d’Abbane. Il avait avec moi un contact suivi au cabinet médical d’El-Harrach, où je travaillais avec le Dr Zmirli et l’infirmière Mimi Benmohammed (future moudjahida de la wilaya IV) qui hébergera notamment, l’été 1955, notre camarade Abdelhamid Boudiaf avant son départ pour le maquis de Chlef). Comme de nombreux autres pionniers du FLN encore peu structuré dans cette région, Fellous (dit Abdelkader) avait soutenu fortement la campagne politique de soutien public au soulèvement national, que moi-même pour le PCA et Ali Boumendjel pour l’UDMA avions menée dans la circonscription de l’Est Mitidja en avril 1955, sous couvert des élections cantonales partielles par lesquelles le gouverneur Soustelle fraîchement arrivé croyait amadouer les partis nationaux. 

Clarifications de part et d’autre 

Pour justifier leurs réticences à prendre contact avec nous en tant que parti, Benkhedda et Abbane nous expliquèrent que l’efficacité de l’action nécessitait, selon eux, de supprimer les différences entre partis, et pour cela le seul moyen était que les partis s’effacent. 

Quand nous leur avons rappelé que les proclamations du FLN faisaient appel à toutes les énergies nationales, ils soulignaient, sans invoquer à ce moment explicitement la dissolution du PCA, que le FLN se proposait de drainer les forces patriotiques en un seul mouvement et seulement sur la base des adhésions individuelles. Nous avons dit que nous comprenions bien l’importance d’une organisation et d’une discipline monolithiques pour tout ce qui concernait le combat et les structurations militaires. Nous estimions cependant qu’en ce qui concernait la mobilisation et l’éducation politiques, elles gagneraient plutôt à se réaliser dans des formes plus larges, plus rassembleuses et par là même plus efficaces. On ferait ainsi de l’autonomie d’opinion et d’expression des organisations qui le souhaitent, un levier supplémentaire de rassemblement. A condition bien sûr, et à partir du moment où cette structuration reposerait sur un solide consensus et une plate-forme d’action reposant sur l’indépendance comme objectif démocratique et social et sur la lutte armée et de masse comme moyen d’y parvenir. 

Or, ces conditions nous paraissaient réalisées : le consensus qui a entouré l’initiative de Novembre 54 était devenu très fort. Il rendait, selon nous, d’autant plus réaliste les modalités d’union respectant les autonomies politiques que nous préconisions, en tout cas pour ce qui nous concernait. Cette forme n’était pas contradictoire avec le rôle de noyau dirigeant auquel le FLN aspirait. Nous estimions qu’il assumerait d’autant mieux ce rôle en prenant appui sur la libre adhésion patriotique des participants. 

A travers ces échanges, la discussion devenait plus détendue, plus transparente, elle confirmait un minimum de confiance réciproque. 

Nos interlocuteurs n’ont pas hésité à nous faire part de certaines de leurs préoccupations et motivations. A propos de l’armement par exemple, ils nous confient qu’ils ont entrepris des démarches auprès du régime dictatorial espagnol de Franco pour obtenir des armes. Bachir et moi, sans nous regarder, n’en fûmes pas trop étonnés. Nous savions déjà que les raisons qui poussaient les dirigeants FLN à demander au PCA de s’effacer en tant que parti n’étaient pas seulement liées à une préoccupation d’efficacité ou même au seul souci de contrôle absolu de toute activité. Elles obéissaient aussi à des calculs et des pressions idéologiques internationales. 

Nous avions eu un exemple de cette ambiguïté deux mois auparavant avec les pressions de la CISL (organisation syndicale mondiale liée aux objectifs et activités de l’OTAN dans la guerre froide) pour encourager la création de l’UGTA, au prix d’une division du mouvement syndical algérien. Mais quelle que soit l’importance de ce problème, nous n’étions pas là pour nous concerter en priorité sur les options idéologiques souhaitables. 

Nous en aurions peut-être discuté davantage et, probablement, sans résultat concret à cette date si nous avions su, comme aujourd’hui, qu’un mois et demi auparavant, le 15 mars 1956, donc vingt jours avant l’opération Maillot, Abbane écrivait aux dirigeants FLN basés au Caire : 

« …Si les communistes (sans doute voulait-il dire les pays socialistes ?), veulent nous fournir des armes, il est dans nos intentions d’accepter le Parti communiste algérien en tant que parti au sein du FLN, si les communistes sont en mesure de nous armer … » (page 164 de l’ouvrage de Belhocine cité plus haut). C’est un thème important, que celui des relations régionales et internationales du FLN ; il mériterait des développements que je n’aborde pas aujourd’hui. 

Vers des points d’accord 

Pour l’instant, il y avait au printemps 1956 un enjeu immédiat, qui dépendait seulement de nous : les armes et les combattants présents sur le terrain, qu’allons-nous en faire ; quoi décider à leur sujet les uns et les autres ?

De chaque côté, nous avions nos propres convictions, nos préoccupations et préférences partisanes, qui divergeaient sur plusieurs points. Mais les premières clarifications apportées par la discussion nous montraient qu’un accord était possible sans que chacun soit obligé de renoncer à ses visions stratégiques de la guerre engagée. 

D’un côté nos interlocuteurs étaient des hommes animés d’une logique et d’un raisonnement politiques. Ils comprenaient l’utilité de l’échange d’arguments politiques dans l’intérêt aussi bien de l’action armée que de la mobilisation de masse. Nous sentions qu’ils n’étaient pas, comme beaucoup d’autres, fortement prisonniers d’une démarche purement activiste qui exacerbe le sectarisme. A défaut d’un accord global sur tout, ils semblaient capables d’apprécier la mise en œuvre d’une unité d’action même partielle. Et surtout, la situation était telle qu’aucun des deux mouvements représentés n’avait intérêt à bloquer un accord possible par des préalables organiques ou chercher à forcer la main de l’autre au risque de nuire aux exigences immédiates de la lutte commune. 

Malgré les apparences, ce n’était pas un simple marchandage « des armes en échange de coopération ». Dans cette conjoncture, nos interlocuteurs tenaient à une coopération qui, d’emblée fructueuse, ouvrirait peut-être d’autres horizons (j’aurai l’occasion d’indiquer pourquoi en cela, ils n’auraient pas eu tort, y compris sur le plan de la solidarité internationale, si notre coopération s’était poursuivie en 1957, après leur départ d’Alger). 

Ils comprenaient que même les plus sectaires dans leurs rangs pourraient difficilement reprocher à des militants non membres des katibas ou des groupes fidayin de l’ALN, de garder leur indépendance organique, alors qu’ils prouvaient par ailleurs leur ferme volonté de soutien. 

De notre côté, coopérer de toutes nos forces n’était pas une contrainte contraire à nos souhaits, mais une orientation de principe. Notre comportement unitaire nous donnait auprès des patriotes sincères la force morale suffisante pour défendre le droit à l’autonomie, certes dans des conditions plus difficiles, nous le savions à l’avance, mais selon nous plus prometteuses d’avenir démocratique. Cela explique pourquoi d’un commun accord, les discussions se sont tournées de façon pragmatique vers les questions concrètes les plus urgentes, en nous réservant de revenir plus tard sur les problèmes de fond pour lesquels nous avions des différences d’approche. Ainsi, dès cette première réunion, ont été arrêtées des décisions pratiques et propositions concrètes qui seraient soumises à nos organisations respectives, mais qui, en fait, seront presque aussitôt adoptées formellement et mises en œuvre des deux côtés. Elles seront prolongées et complétées à la rencontre suivante une ou deux semaines plus tard (à l’ex-rue Horace-Vernet, au domicile d’un couple européen chrétien sympathisant du FLN). 

La coopération démarre 

Ainsi, les contacts ont été mis au point entre les CDL d’Alger et les responsables de la Zone autonome d’Alger pour intégrer leurs groupes, en conservant (sur proposition même de nos deux interlocuteurs) leur propre structuration pour garder leur caractère opérationnel. Pour les groupes des campagnes, particulièrement ceux de Chlef, d’Aïn Defla, de Ténès, etc., les contacts ont commencé également entre les responsables de notre Comité central présents sur place dont le travail d’implantation était déjà bien avancé (avec Boudiaf, Babou et Saadoun) et ceux du FLN (je me souviens seulement des noms de Baghdadi et Omar Belmahdjoub) qui débutaient de leur côté un travail difficile dans cette région encore fortement sous influence messaliste. Ce travail commun de mise en place était assez avancé lorsqu’un envoyé de la zone vint à Alger en faire le compte-rendu à une nouvelle rencontre avec le FLN (rue Pirette, au domicile de nos camarades Servetti), le lendemain du jour de la mort de Maillot au combat. Les structurations se poursuivront plus tard, de même que les livraisons d’armes. 

Plus tard, nos camarades Abdelhamid Boudiaf et Abdelkader Babou feront partie de la direction dans la région FLN-ALN d’El-Asnam, dont Djilali Bounâama, futur colonel Si Mohammed de la wilaya IV, a été le responsable militaire. 

Pour l’Atlas blidéen, nos groupes de jeunes ruraux ou citadins (issus surtout de

Larbâa, Bougara, El-Harrach, Alger ville,), Abdelkader Choukal nous fit savoir que les contacts s’étaient bien passés, grâce en particulier à l’esprit ouvert de Dehilès (plus tard colonel Si Sadeq) auprès de qui il assuma les tâches de secrétariat. Notre groupe de Baraki dans la Mitidja a continué d’être, pendant toute la guerre, une plaque tournante logistique et politique entre la capitale et les maquis. 

Sur place à Alger, Bachir Hadj Ali informait les membres de la direction pour engager de larges discussions au sein du Comité central concernant le souhait du FLN de voir le PCA se dissoudre, comme venaient ou étaient en train de le faire le MTLD centraliste, l’UDMA et les Ouléma. Je procédai de même avec les cadres des CDL pour les informer et recueillir leurs avis sur les nouveaux contacts qu’ils allaient prendre incessamment. 

Pendant ce temps, une coopération FLN PCA se poursuivait au plus haut niveau, y compris pour des questions pratiques courantes. On verra ainsi Benkhedda (« M. Joseph ») et Jacques Salort se rencontrer plusieurs fois dans la rue pour mettre au point des consignes logistiques, échanger selon les besoins réciproques des cartes d’identité, des balles de pistolet de calibres plus conformes aux armements respectifs et emballées dans des paquets de café en grains, etc. La liaison permanente entre nos deux directions se faisait à travers des Européens moins vulnérables aux contrôles policiers, le couple Gautron du côté FLN, Annie Steiner et Joséphine Carmona de notre côté. 

Plus tard, après l’été, je serai en contact et hébergé chez Aline et Pierre Coudre dans un ancien pavillon de l’époque turque, séparé du Palais du Peuple actuel par le chemin de Gascogne. C’est là que sont coulés encore à ce jour, dans un bloc de ciment, certains de mes anciens papiers d’identité. Aline et Pierre formaient un couple exceptionnel par sa modestie, son sang-froid et son abnégation. Résistant français anti-nazi dans les maquis de la Dordogne dans les années quarante, alors qu’il y était jeune berger, Pierre fut lié de près aux multiples activités d’Abbane avec Amara Rachid ou Nassima Hablal (qui tapait chez lui les documents tels que ceux liés à la préparation du Congrès de la Soummam). 

Une de ses multiples fiertés et souvenirs reste, avant les dures épreuves qu’il subira après son arrestation, d’avoir hébergé une réunion de plusieurs dirigeants avec Abbane (venu en traction-avant et sous protection) ou encore Amara Rachid avant son voyage à Sétif pour contacter Ferhat Abbas. Il avait aussi hébergé le groupe de jeunes filles la veille de leur départ pour le maquis et avait encore aidé aux échanges de documents entre la direction du FLN et Moufdi Zakaria pour le projet d’hymne national. 

Mon récit vient d’anticiper sur les semaines et les mois qui ont suivi. 

Mais je reviens à notre première rencontre avec les dirigeants du FLN à travers un autre aspect, car avant de nous quitter et d’une façon imprévue, un nouveau thème était venu sur le tapis. Son importance se fera sentir au cours des décennies suivantes et restera actuel jusqu’à nos jours. 

Rebondissement de la discussion 

Nous en avions fini provisoirement avec les échanges concernant nos groupes armés et avions précisé certaines modalités des prochains contacts pour les poursuivre après consultation de nos instances respectives. Ben Khedda, sans doute pris par un autre rendez-vous, sort le premier. La discussion se poursuit alors avec Abbane. Il est détendu et visiblement satisfait de la franchise de nos discussions, avec dans le regard une pointe d’affabilité souriante (peut-être est-ce à cause de sa mort tragique dix-huit mois plus tard que cette image est restée en moi). 

Les échanges à bâtons rompus portent sur les perspectives d’après l’indépendance, les options sociales. On parle de l’émergence impressionnante des pays du « groupe de Bandoeng ». Je ne me souviens pas qu’il ait dit un seul mot (Benkhedda non plus) du vote des pouvoirs spéciaux par le PCF, alors que nous-mêmes, quand nous étions au mois de mars en pleine préparation de l’opération Maillot, cela ne nous avait pas rendu particulièrement heureux (ce sera un des points que Larbi Bouhali, premier secrétaire du PCA, posera aux dirigeants du PCF au début de 1957, après qu’il sera sorti clandestinement d’Algérie à la fin de 1956). Avec le recul, je me suis demandé, plus tard, si le silence d’Abbane sur ce point n’était pas dû à l’existence des sondages et tractations des milieux gouvernementaux français. Tout en renforçant en ce moment leur dispositif répressif militaire et policier, ils envoyaient discrètement des émissaires disant vouloir explorer des conditions de négociation avec le FLN (on en verra, en octobre, la confirmation, avec le kidnapping de l’avion des « Cinq »). 

Abbane nous dit aussi sa préférence pour un socialisme non-aligné, « à la yougoslave, façon Tito ». 

Puis, comme nous prenant à témoin d’une question qui le tracasse, il poursuit : « J’aimerais avoir votre avis, nous sommes indécis. La création de l’UGTA, deux mois auparavant, nous a fait problème. Des responsables syndicaux anciens et expérimentés, membres du FLN, ne sont pas à l’aise ; ils auraient voulu ne pas quitter l’UGSA (ex-CGT) et disent que la division syndicale n’est pas une bonne chose. » Parmi eux, il cite Belmihoub, responsable bien connu des cheminots — qui à ma connaissance n’était pas communiste — et d’autres encore, dont il ne nous a pas dit les noms. Il demande aussi : « Que pensez-vous d’Ouzegane ? Nous cherchons à contacter des personnes pour avoir leurs avis. Nous voulons travailler à un document d’orientation sur ces problèmes … » 

La question d’Abbane était-elle un simple sondage ou reflétait-elle une préoccupation réelle, un souci de faire reculer les conséquences négatives d’une division dans le monde des salariés algériens ? Cette dernière hypothèse n’est pas à exclure. 

Abbane, on le voyait bien, était farouchement attaché à l’hégémonie politique du FLN. Aucun doute à ce sujet, peut-être même cela pouvait-il s’exprimer chez lui par des impulsions autoritaires. Il nous paraissait néanmoins, dans son fond, attentif à un certain esprit rassembleur, tout au moins tant qu’il estimait maîtriser le processus de prééminence incontestée du FLN et de son appareil. Comme l’entretien qui venait de s’achever venait de le montrer, il était apparemment ouvert à des formes consensuelles permettant d’aplanir les obstacles à un plus large rassemblement pour renforcer la lutte. 

Quelle voie pour l’unité syndicale ? 

Rien ne l’obligeait, en fait, à nous livrer sa pensée et ses interrogations. Il savait que nous jugions la création de l’UGTA pour le moins ambiguë dans certaines de ses motivations et dans ses modalités. Il aurait pu, comme l’aurait fait Benkhedda à mon avis, continué à garder le silence prudent et le camouflage des intentions qui avaient entouré la préparation de cet événement. On sait que la création de l’UGTA fut précipitée suite à l’initiative messaliste de l’USTA qui avait pris de court le FLN. Mais elle était souhaitée depuis des années sans qu’elle puisse être mise en discussion publiquement ou réalisée, du fait de l’état d’esprit dominant chez les travailleurs et les militants syndicaux, y compris chez des nationalistes, expérimentés et engagés de longue date dans les luttes sociales (voir à ce propos le témoignage de Lakhdar Kaïdi, dans ses Mémoire s recueillis par Nasser Djabi, aux éditions Casbah). 

En réalité, ce qui nourrissait nos doutes sur les intentions de certains initiateurs de la création de l’UGTA, c’est que si leur l’initiative avait seulement visé un renforcement à la fois du mouvement national et du mouvement syndical et ouvrier, qu’est-ce qui les aurait empêchés, au lieu d’agir en catimini, de la préparer en concertation et coopération avec l’ensemble de ceux qui auraient été d’un très grand apport dans ce domaine ? 

Nous avons répondu à Abbane que l’unité syndicale a toujours été à nos yeux, importante pour un meilleur contenu et de meilleures perspectives du mouvement national. 

Nous regrettions la décision unilatérale du 24 février et son caractère politicien par rapport à ce que devrait être la vocation d’un large mouvement syndical. Nous estimions que la réaction de patriotes syndicalistes tels que ceux qu’il nous citait était saine et compréhensible. Elle ne nous étonnait pas, nous en connaissions de nombreuses autres aux différents niveaux. Mais devant ce fait accompli, il n’était pas encore trop tard, selon nous, pour sauvegarder une unité syndicale précieuse aussi bien pour le soutien de la lutte armée déjà engagée que pour les intérêts des travailleurs. C’était d’autant plus possible que les deux centrales étaient d’accord sur le fait que l’intérêt national et les intérêts spécifiques des travailleurs, déjà acquis ou restant à conquérir, étaient inséparables. Il suffirait que les deux centrales engagent ensemble un processus unique et démocratique d’élections syndicales à la base, sur tous les lieux de travail, pour aboutir à des structures et des directions unifiées. L’appellation importerait peu. Cette façon de faire vaudrait à la centrale unique la confiance redoublée des travailleurs, elle lui assurerait un dynamisme plus grand. Elle permettrait de faire mieux fructifier l’expérience accumulée par les cadres syndicaux de toutes les tendances. 

Rappelons que ce processus était encore possible à cette date, car malgré l’état de guerre, la répression du mouvement syndical ne s’était pas encore abattue avec la férocité qu’elle connaîtra quelques mois plus tard. 

Abbane a écouté, intéressé, comme si la question était en suspens et pouvait encore être discutée. 

Il y a quelques années, j’ai eu confirmation qu’effectivement un courant d’opinion et des débats, avaient eu lieu parmi les cadres syndicaux acquis au FLN, en faveur de la préservation de l’unité d’organisation syndicale. Une lettre a même été adressée par un groupe de cadres syndicaux à la direction du FLN, sans doute celle à laquelle s’est associé Belmihoub. Un ancien ministre m’a dit qu’encore écolier, il avait écrit cette lettre sous la dictée de son père à Constantine, il se souvenait de son contenu, celui-là même dont Abbane s’était fait l’écho. 

Mauvais présages pour l’Algérie indépendante 

Lors de nos rencontres ultérieures les mois suivants, il n’a plus été question de syndicats. Nous étions en réalité conscients que les pressions internationales occidentales, les réflexes du recours facile aux voies autoritaires ou bureaucratiques, les préjugés, les ambitions d’appareils et les règlements de compte sectaires avaient été d’un poids beaucoup plus grand dans la nouvelle conjoncture que le respect des principes de fonctionnement liés à la nature d’un mouvement syndical. 

Il est sûr que parmi les militants syndicaux sincères qui souhaitaient la création d’une nouvelle centrale plus directement liée au FLN, nombre d’entre eux ont fait confiance aux courants et déclarations du FLN se réclamant d’une démocratie sociale. Ils pensaient sincèrement que la voix des travailleurs pourrait continuer à s’exprimer et à peser de façon bénéfique dans le grand rassemblement national incarné, à leurs yeux, par le FLN. Sans doute n’ont-ils pas perçu à ce moment que cela aurait nécessité des débats plus ouverts et une expression plus affirmée, ainsi que des garanties plus formalisées du besoin d’autonomie du mouvement ouvrier au sein de l’alliance nationale. 

Les méthodes qui ont prédominé, faute de cette pression positive de la base et des cadres les plus conscients, ont été cautionnées par certaines appréciations fallacieuses du Congrès de la Soummam, enveloppées dans un langage de surenchère sociale (j’en reparlerai). 

Elles ont accentué la fermeture par rapport aux acquis précédents du mouvement syndical algérien. On ne peut s’étonner des évolutions négatives des décennies suivantes, car les choses avaient pris un départ trompeur dès 1956. Dans un environnement antidémocratique et utilisant les séductions de l’arrivisme social, les bonnes intentions et la bonne foi des cadres syndicaux honnêtes ne suffisent pas. Elles ne peuvent remplacer l’affirmation consciente et vigilante de l’autonomie du mouvement syndical et ouvrier, même si c’est dans des formes appropriées aux conditions de guerre ou situations nationales exceptionnelles. Je le sais pour avoir rencontré à plusieurs reprises durant la guerre, entre 1958 et 1960, des cadres syndicaux honnêtes, formellement affiliés à l’UGTA. Ils se plaignaient, tous, que les gens du « nidhâm » (l’organisation, dans une confusion totale entre FLN et syndicat) ne venaient les voir que pour ramasser l’« ichtirak » (cotisations), mais « fi ouaqt essah », au moment des batailles, des grèves et actions revendicatives, on ne les voyait plus ou, alors, ils leur mettaient des bâtons dans les roues. J’avais toutes les peines à convaincre ces cadres chevronnés, tel que le vétéran des dockers « Ammi » Saïd (qui sera assassiné par l’OAS), d’œuvrer dans les structures de l’UGTA, comme y avait appelé la direction du PCA à partir de 1957, c’est-à-dire après que les deux centrales (UGSA et UGTA) aient été interdites par les autorités coloniales. Nous souhaitions ainsi, dans un esprit unitaire, encourager l’initiative des courants les plus conscients et combatifs dans le cadre d’une centrale unique. 

Et aujourd’hui ? 

En définitive, faute d’une contre-pression positive et constructive suffisante des cadres syndicaux et des courants patriotiques, les dirigeants « historiques » vrais ou supposés du FLN n’ont pas respecté le contrat de confiance auquel s’étaient fiés les militants syndicaux FLN sincères. Ils ont tout fait pour les pousser à la résignation et les intégrer dans leurs luttes de clans et intérêts de pouvoir. 

A l’indépendance, à l’exception d’Aït Ahmed et de Boudiaf, les anciens et nouveaux « za’îms » se sont ligués pour écraser les libertés syndicales au Congrès de l’UGTA de janvier 1963, alors que par ailleurs ils se déchiraient férocement entre eux pour le pouvoir. 

En fait, pourquoi le contrat de circonstance mis sur pied en février 1956 était-il boiteux et ne pouvait que déboucher sur une contradiction majeure ? Parce qu’il a été mis sur pied par le haut et pour des besoins de conjoncture. Et surtout parce que dès le départ, ceux qui avaient patronné le processus même avec de bonnes intentions, avaient considéré (ou s’étaient résignés au fait) que le mouvement syndical était davantage un instrument auxiliaire de pouvoir qu’un levier démocratique pour élargir les conquêtes sociales. Au lieu d’être corrigé à l’indépendance, ces motivations et ce processus se sont aggravés. 

Bilan à l’arrivée de 1962 : le slogan héroïque « la parole au peuple », qui était celui du PPA des années quarante, a été trahi et perverti, transformé en « la parole aux fusils » et traduit rapidement en « pouvoir pour l’argent et par l’argent » Ainsi a été instauré le règne de la « hogra » contre les travailleurs et leur représentation légitime. 

La centrale officielle, n’a gardé de syndicat que le nom, à l’image d’un système se proclamant démocratique et populaire tout en détournant les espoirs démocratiques à l’encontre des intérêts de la nation. 

Quand après cinquante ans, je repense à notre première rencontre FLN-PCA de mai 1956, je me dis que les générations émergentes assoiffées d’histoire véridique sont aujourd’hui en mesure de comparer les deux voies qui s’offraient alors au mouvement national, au carrefour crucial de la guerre de Libération. 

Les faits parlent d’eux-mêmes. Mais on aurait tort d’en rester aux constats amers. 

Les expériences malheureuses d’un demi-siècle sont instructives pour ceux et celles qui veulent garder les yeux ouverts sur les enseignements du passé. Les acteurs des mouvements sociaux de plus en plus amples et conscients d’aujourd’hui sont le fait de ceux qui veulent rester les yeux ouverts et garder la mémoire longue. 

Doit-on culpabiliser les acteurs politiques et militaires de l’époque pour les erreurs, les insuffisances ou les fautes graves qu’il nous est plus facile de percevoir aujourd’hui ? Ce n’est pas le plus important. Ces acteurs ont eu le mérite de s’engager dans un combat terriblement difficile, auquel l’abnégation et les sacrifices du peuple ont permis de donner une issue victorieuse, malgré tous les gâchis. Ils ont l’excuse que le mouvement national d’avant 1954 n’a accompli que partiellement et parfois négativement l’effort d’éducation politique et idéologique dont aurait eu besoin le mouvement insurrectionnel. 

Et surtout ne restons pas, comme Bo’abdil après la chute de Grenade, à pleurer ce que nous n’avons pas réussi à défendre. Il est mille fois plus important d’aborder les combats tout aussi difficiles d’aujourd’hui, en nous dégageant, en actes et pas seulement en paroles, des limites et des étroitesses du passé. Cherchons au contraire à valoriser par nos actes ce qu’il y eut de plus glorieux, de plus ouvert et de plus prometteur. 

Chacun peut y contribuer, à partir de sa sensibilité idéologique et de son expérience politique.

L’évocation de ce qui s’est passé avant et après le Congrès de la Soummam d’août 1956 m’en donnera l’occasion.

 

.In ALGER républicain Du mois de juin 2006 

par Sadek Hadjerès* 

29 mai 2006) 

(*) Ancien dirigeant du Parti

communiste algérien et du PAGS.

4 avril 2016

Pour une relance réelle et durable du Mouvement Communiste et Ouvrier en Algérie

 

Pour une relance réelle et durable du Mouvement Communiste et Ouvrier en Algérie

Saïd Bouamama et Kamel Badaoui

 

lundi, 4 avril 2016 

                                      

 

arton1186

Des militants de l’ex-PAGS ont réagi à l’article de Sadek Hadjerès (membre du Secrétariat du CC du PCA avant 1966, puis 1er secrétaire du PAGS de 1966 à 1990), publié (via le site socialgerie.net) à l’occasion du 50ième anniversaire de la création du PAGS (fondé le 26 janvier 1966), et intitulé « Le PAGS et le PAYS :

CINQUANTE ANNÉES PLUS TARD ». 

Deux questions ont été amenées par cet article et les réactions qui l’ont suivi : le bilan et la destruction du PAGS.

Ce sont, évidemment, des questions d’une importance première pour les communistes algériens. 

Comme l’est celle de la contre-révolution dans l’ex-URSS et l’ex-camp socialiste qui a tant pesé et pèse encore sur l’ensemble du mouvement communiste et ouvrier international (MCOI). 

Nous vous soumettons ce premier avis, avec l’objectif, sans prétention, mais avec une conviction de communistes, de contribuer à lancer et instaurer un débat approfondi sur les succès et les échecs du mouvement communiste et ouvrier en Algérie (MCOA). 

Un tel débat, mené de façon démocratique, acceptant les différences et divergences, voire autorisant la polémique politique argumentée (notamment à cette étape d’échanges), ne sera fécond que s’il aide à impulser et à orienter les luttes syndicales sur des bases de masse et de classe, les luttes sociales, culturelles et politiques sur des bases idéologiques offensives, indépendantes de l’idéologie bourgeoise dominante (y compris dans sa variante religieuse), et aide à progresser dans la formulation toujours plus claire des étapes de reconstruction d’un parti communiste : un parti armé de la théorie marxiste-léniniste, au service des exploités et internationaliste. 

Car, pensons-nous, comme d’autres militants communistes, un tel parti ne peut-être le résultat de conclaves ou d’une auto-proclamation. Il ne peut être que le résultat d’un processus de fusion entre la théorie marxiste-léniniste et le mouvement ouvrier. La première sans ancrage dans le mouvement ouvrier ne dispose pas de la base d’enquête permettant « une analyse concrète de la situation concrète ». Le second sans la première peut mener des combats courageux mais sans perspective victorieuse de long terme. 

Un tel parti ne peut être réduit à la seule fonction syndicale de défense des intérêts immédiats des couches populaires, comme il ne peut se passer d’un front syndical de masse et de classe. 

Comme nous pensons que le futur parti communiste ne peut être basé sur un regroupement affectif et nostalgique de militants de l’ex-PAGS, ou encore de militants non remis de leur démoralisation après les cycles prolongés et encore actuels des défaites du camp du travail, donc prisonniers d’une vision mortifère de l’avenir des luttes qui vaut souvent abandon des luttes. 

Nous nous adressons donc aux militants convaincus de la nécessité de la reconstruction d’un tel parti, qui organise l’effort collectif de liaison (théorique et pratique) entre les luttes quotidiennes et les luttes pour le socialisme, pour être en capacité stratégique d’anticiper le mouvement historique de la société algérienne vers le socialisme. 

La question de l’organisation du débat (formes, cadres, consignations et publicité des échanges, …) fait partie du débat. 

Toutefois, il nous semble important de rappeler qu’elle ne doit pas l’emporter sur les objectifs du débat. 

En particulier, les expériences politiques et organiques des uns et des autres (après la destruction du PAGS) ne doivent freiner ni le débat, ni le déploiement d’actions unies construites collectivement par des militants communistes non organisés et des militants communistes organisés dans divers collectifs, y compris ceux organisés au sein du PADS quand ils reconnaissent (dans le discours et la pratique) que le PADS n’est peut-être qu’un noyau de ce parti à reconstruire (cf. « Le PADS dans la continuité et la fidélité aux idéaux communistes, Double anniversaire PCA-PAGS 1936-1966 », republié en janvier 2016). 

Nous souhaitons rappeler que nous militons au sein de l’immigration en France. 

Notre activité politique principale actuelle est de contribuer à la construction d’une organisation de masse des jeunes immigrés (le Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires, FUIQP) comme instrument politique auto-organisé et autonome (vis-à-vis des forces sociale-démocrates) au service des habitants des quartiers populaires en lutte contre le racisme d’Etat, l’islamophobie, les crimes racistes et sécuritaires, les violences policières systémiques, les discriminations à l’école et au travail, contre leur paupérisation et leur précarisation, pour le droit de vote des étrangers, les droits et la dignité des Chibanis et Chibaniyas, contre les guerres impérialistes (notamment en Palestine occupée). 

Né début janvier 2012, le FUIQP a acquis une audience nationale (dans l’immigration en France) grâce à l’engagement et l’activité d’une centaine de sympathisants et de militants agissant dans cinq comités dans de grandes villes de France (Marseille, Grenoble, Lille, Saint Etienne et Paris). 

Nos idées de communistes (exprimées dans le respect du caractère de masse de l’organisation) ont un très large écho et autorisent un grand espoir pour former et recruter de futurs militants communistes dans l’immigration algérienne. 

Enfin, précisons, qu’en exposant ces idées critiques, nous ne nous en abstrayons nullement. 

Le bilan des acquis incontestables du MCOA (PCA et PAGS) ne sera pas abordé dans cet avis et reste à réaliser collectivement. 

Aussi, nous réaffirmons notre respect pour tous les camarades aînés qui se sont engagés sans limites pour l’avenir socialiste de l’Algérie, notamment celles et ceux tombés en martyrs de la lutte armée de libération nationale et celles et ceux assassinés par les hordes fascistes du FIS-GIA-FIDA. 

Une analyse matérialiste 

Une analyse matérialiste des succès et des échecs du MCOA est nécessaire. Une analyse dans laquelle causes et conséquences ne risquent pas d’être inversées.

C’est en dépassant le seul partage du constat, en partageant l’analyse des causes de la défaite que l’effort collectif de la reconstruction sera durable et fructueux. 

Cela implique déjà de ne pas s’emprisonner dans des explications évènementielles ou centrées sur les personnes. 

C’est parce que certaines conditions, précisément qu’il nous faut mettre en évidence et caractériser par cette analyse matérialiste, ont existé que, au-delà des personnes responsables, aux « commandes » de l’appareil, des orientations politiques ont pu naître et s’imposer, puis se déployer et se concrétiser en succès ou échecs du MCOA. 

Cela est aussi vrai pour la destruction du PAGS. 

D’emblée donc, et comme nombre de militants communistes l’ont déjà affirmé, nous ne souscrivons pas à la thèse de l’infiltration policière comme facteur explicatif principal, et encore moins comme facteur exclusif, de la fin du PAGS.

On pourrait même invoquer comme contre-argument à l’inconsistance de cette thèse, la longue expérience du PCA, puis du PAGS, dans le travail clandestin et la protection physique et des militants communistes : près de 40 années en clandestinité sur un peu plus d’une cinquante années d’existence (depuis la création du PCA les 17, 18 octobre 1936). 

Cette infiltration du PAGS au plus haut niveau de direction, aujourd’hui avérée, suite à de nombreux témoignages convergents, est à analyser comme le résultat d’un processus qui l’a rendue possible et a anesthésié la résistance des communistes puis leur défaite au sein du PAGS. 

Infiltration politique policière et sociale-démocratisation du parti se sont nourries mutuellement. 

Nous éviterons aussi le terme de trahison qui focalise sur la responsabilité des personnes (laquelle est réelle, notamment au niveau dirigeant) et farde les facteurs objectifs qui ont autorisé et même accéléré la destruction.

De même, la qualification d’implosion, en évoquant l’idée de soudaineté, empêche de déconstruire puis reconstruire le processus qui a mené à la défaite. 

On ne peut donc partir de la fin du film et regarder les photos une à une, sans saisir les liens entre elles : il nous faut mettre en évidence les germes qui, dès le début, en remontant y compris à la naissance du PCA, ont contribué à rendre possible ce cheminement. 

A ce propos, le document du PADS cité plus haut (déjà publié en octobre 1996) comporte des éléments d’appréciation sur le PCA et le PAGS fort utiles à ce débat. 

En souscrivant à nombre d’appréciations contenues dans ce document, il nous importe d’affirmer notre conviction qu’on ne peut être partie prenante de la reconstruction du parti communiste et s’auto proclamer LE parti des communistes algériens. 

Le MCOA et la question nationale 

Il n’est pas inutile de se rappeler que le PCA est né dans une Algérie colonie française et pays d’Islam, sous la coupe idéologique et organique du PCF. A l’origine, Le PCA était la région algérienne du PCF. Le PCF, tout en adoptant les recommandations bolchéviques de la 3ième Internationale, n’a pas moins véhiculé, à plusieurs périodes clés de l’histoire de la France et de l’Algérie, des idées réformistes vis-à-vis de l’avenir de l’Algérie colonisée et de l’Algérie indépendante. 

Ainsi en est-il de la période 1936 du Front Populaire et la thèse de l’union du peuple de France (y compris des colonies) : la victoire du prolétariat de la métropole entraînerait celle des peuples colonisés. En conséquence de quoi, le mot d’ordre d’indépendance, avancé déjà par les communistes algériens dès les années 20 (dans l’immigration, au sein de l’Etoile Nord Africaine), est tu. 

Les ambiguïtés du PCF sur la question algérienne ont ainsi été à plusieurs reprises critiquées par l’internationale communiste. Cette dernière revient également à plusieurs reprises de manière critique sur les lenteurs du PCF à « algérianiser » sa région algérienne pour qu’elle se transforme réellement en parti national. 

De même, pour la période de la 2ième guerre mondiale, la lutte anti coloniale était considérée comme secondaire par rapport à la lutte antifasciste, voire un frein comme l’illustre l’erreur d’appréciation du PCF et du PCA sur le soulèvement populaire du 8 mai 1945. 

L’interprétation des thèses du 7ième congrès de l’internationale communiste sur la lutte antifasciste comme une stratégie alors qu’il s’agissait d’une tactique prenant en compte la nouvelle situation du monde avec le développement du fascisme. 

Cette interprétation droitière hiérarchise la lutte antifasciste et la lutte anticoloniale alors qu’il s’agissait de les articuler comme l’a fait le parti communiste vietnamien. 

Ces erreurs « originelles » ont été identifiées et rectifiées par la direction du PCA après 1945.

Pleinement engagé dans la lutte armée pour la libération nationale (au sein des CDL et au sein de l’ALN), le PCA est apparu, depuis, plus un parti national que de classe. 

Il est probable que ces erreurs « originelles », ont développé un sentiment profond au sein des directions successives du MCOA (PCA et PAGS) : celui de la peur d’apparaître comme anti national ou insuffisamment national. 

Cela a pu entraver à l’indépendance l’affirmation des différences de classe entre les communistes et les autres fractions du mouvement national. 

Ce sentiment a vraisemblablement perduré avec la création et le développement du PAGS. 

On peut observer en effet que le PAGS, dès sa naissance (sur la base de la plateforme de janvier 1966), et jusqu’à sa sortie de la clandestinité (en 1989), a surtout joué le rôle de front : subjectif, comme cadre organique commun à des communistes et à des non communistes, et objectif, sur le terrain des actions unies avec d’autres forces politiques.

Ont été ainsi mises au second plan les questions stratégiques pour un parti communiste : la lutte pour une influence communiste toujours plus grande sur les tâches de la RND, et la question du pouvoir. 

Même si la résolution du CC du PAGS du 9 mai 1969 a rappelé l’objectif du socialisme, sa traduction politique sur le terrain a peiné à être conséquente : la lutte pour l’activité indépendante et légale du parti était éludée, y compris pour l’élévation du niveau de formation communiste de cadres en interne.

La politique de « soutien critique » du PAGS 

Cette politique a certes donné des résultats probants quant à l’impulsion de la mobilisation de masse (pour les tâches d’édification nationale). Mais elle a aussi confiné le parti dans un rôle de pompier et d’alarme sur les dangers guettant la RND, pour orienter fréquemment l’expression publique du parti vers les progressistes au sein du pouvoir et des institutions. 

A la base de cette démarche, n’y avait-il pas la conviction de la direction politique du PAGS que le FLN était capable de se rénover et de se transformer en parti d’avant-garde ? 

L’activité du parti tendait ainsi à se contenter de soutenir les fractions les plus progressistes de la petite bourgeoisie radicale et à reléguer au second plan l’affirmation d’une position de classe indépendante.

Sur la période 1980-1990, le pouvoir devenant de plus en plus anti populaire, ce soutien critique équivalait, aux yeux des masses, à un soutien tout court. 

Trois idées ont nourri (à chaque fois dans un contexte national et international précis) ce glissement idéologique et favorisé une social-démocratisation rampante du PAGS (même si ces idées n’étaient pas coagulées ni formulées expressément et publiquement comme ci-dessous) : 

La thèse mécaniste que le développement des forces productives, indépendamment des formes de propriété, était en soi une garantie d’un achèvement victorieux de la RND. 

Le choix économique des « industries industrialisantes » - tout en démultipliant les forces productives, tout en répondant aux besoins de vie et de travail des couches populaires, tout en élargissant la base sociale de la RND par l’accroissement des effectifs de la classe ouvrière - n’a pas était accompagné de luttes conséquentes et victorieuses pour traduire politiquement le rôle économique de plus en plus grand des producteurs de richesses, et, ce faisant, consolider l’option socialiste. 

Or, comme le disait Lénine, « le socialisme, c’est les soviets plus l’électricité », c’est-à-dire à la fois un état des forces productives et un changement des rapports sociaux. Le développement des forces productives ne peut jamais nous faire faire l’économie de la prise du pouvoir d’Etat sans lequel aucun changement des rapports sociaux n’est possible.

La thèse de la voie non capitaliste de développement et ses conséquences (possibilité de construire le socialisme sans parti communiste, parti d’avant-garde comme fusion de communistes et de non communistes, surestimation du poids des démocrates révolutionnaires, eurocommunisme et spécificité du socialisme de chaque pays, …). 

Cette thèse promue par une Union Soviétique déjà touchée par le révisionnisme, depuis les réformes de Khroutchev, conduit une nouvelle fois à la négation de l’objectif de la prise nécessaire du pouvoir et, en conséquence, à la négation de la nécessité de construire un parti communiste susceptible de mener à bien cette tâche historique.

La thèse de la suprématie des intérêts sociétaux sur les intérêts de classe (gorbatchévisme). 

Si Khroutchev enclenche avec ses réformes le processus révisionniste, Gorbatchev le clôt avec cette thèse. La contradiction de classe cesse d’être perçue comme la contradiction fondamentale du système capitaliste mondial. D’autres contradictions peuvent alors prendre cette place selon les pays et ces dernières ne sont pas analysées sur la base de la contradiction de classe. 

En écho à cette thèse, les rédacteurs de la résolution politico-idéologique (RPI) abandonnent l’analyse en termes de luttes des classes pour la réduire en luttes entre fractions de la classe bourgeoise : des capitalistes « modernes » qu’il faut soutenir, et des capitalistes « archaïques » qu’il faut combattre. 

Ce raisonnement n’est pas sans rappeler la thèse raciste, exprimée par la section de Sidi Bel Abbès du PCA (en 1921, exclue par la suite), sur l’incapacité des indigènes à mener le développement de l’Algérie. 

Le soutien critique a également conduit à plusieurs angles morts pour préserver des « alliances » au sommet, ou, pour le moins, ne pas entraver la convergence avec certaines fractions du pouvoir. Ces luttes ont été délaissées et cela a mis la classe ouvrière et les masses populaires à la remorque de l’idéologie bourgeoise. 

Libertés collectives et individuelles : s’il est juste d’un point de vue matérialiste de mettre en avant les droits économiques collectifs comme l’a fait le PAGS, il est cependant erroné de les opposer aux droits démocratique individuels. La classe ouvrière a besoin du maximum de libertés démocratiques pour construire son parti et son combat. Les communistes doivent être à l’avant-garde du combat pour les libertés démocratiques. L’étape de la révolution est bien la RND, c’est-à-dire la prise en main des tâches nationales et démocratiques. 

Faute d’une prise en charge de ces tâches par les communistes, d’autres forces s’en emparent à des fins réactionnaires. 

Les langues et les cultures : s’il est juste de mettre en avant l’unité nationale contre l’impérialisme, il est erroné de la mettre en opposition avec les revendications culturelles et linguistiques des différentes composantes de la nation. 

L’unité nationale n’est pas synonyme d’unicité culturelle pour les communistes, comme en témoigne la politique des nationalités de l’URSS. 

Une nouvelle fois faute de prise en charge de ces luttes, ce sont des réactionnaires qui s’en emparent. 

La religion et les mouvements politiques sous couverture identitaire religieuse : s’il est juste de travailler à rassembler les travailleurs (en majorité croyants dans un pays d’Islam) dans les luttes nationales et de classe, il n’est pas moins important de veiller en permanence à élever le niveau de formation idéologique des communistes (à tous les niveaux de responsabilité, et notamment ceux versés dans le mouvement de masse) pour parer à toute illusion d’une convergence entre matérialisme historique et idéologie religieuse. 

D’autant plus que le FIS (principal parti à couverture religieuse) menait très tôt d’intenses campagnes sociales dans les quartiers populaires (pour grossir ses troupes) et apparaître comme un défenseur de l’islam des mousstedâfine (équivalent de la théologie de la libération). 

Le combat, qui s’imposait aux communistes, ét ait de combattre le FIS comme force politique de droite (de par ses objectifs de libéralisation et de « bazardisation » de l’économie, et ses méthodes putschistes), mais aussi de lutter pour prendre la tête du mouvement populaire de protestation et de contestation du pouvoir allié objectif du FIS de par sa soumission et son adhésion aux injonctions politiques et économiques du FMI et de la Banque Mondiale. 

Les actions fascistes du FIS-GIA-FIDA, dans un contexte de mouvement identitaire religieux populaire et de masse, ont probablement poussé le parti à ne pas marquer ses différences idéologiques pour ne pas être traité d’anti religieux. 

Dans le même temps, au cours des révoltes 1988 et après, la direction du PAGS, dans son hésitation à soutenir le mouvement de colère populaire ascendant, a soutenu les réformes d’infitah d’un pouvoir devenu largement anti populaire … considéré comme garant de stabilité sociale et de sauveur de la « République » et de la nation. 

La tête de la contestation populaire, place naturelle des communistes, est devenue vacante, et le FIS, identifié comme ennemi principal, l’a occupée et bien exploitée en criant haut et fort « ennemi du FIS égal ennemi du peuple ».

Le fonctionnement du PAGS dans la clandestinité et à la sortie de la clandestinité 

Une donnée majeure doit être prise en compte : le PCA a vécu longtemps en clandestinité ; tandis que le PAGS est né dans la clandestinité et a vécu presque entièrement dans la clandestinité (de 1966 à 1989).

Cette situation, imposée aux communistes, a profondément façonné leur fonctionnement. 

La clandestinité a certainement contribué à protéger physiquement des militants du parti des services de répression policière, avant et après l’indépendance, comme elle a permis au parti de maintenir et de mener des activités politiques d’envergure nationale et même internationale. 

Cela étant, des conséquences négatives s’en sont suivies et ont perduré parce que le parti ne les a pas corrigées. A

la sortie à la légalité, elles sont devenues plus évidentes ; elles se sont même amplifiées dans certaines situations en raison d’une conception erronée de la clandestinité. 

Deux idées, favorisées par la clandestinité, ont présidé à cette conception : 

Un militantisme d’apparence élitiste, dirigé par des cadres (comme des « minorités agissantes ») qui transmettent, fréquemment par contacts individuels, des orientations et des instructions toutes ficelées (par un BP ou CC inconnus et inaccessibles) pour être appliquées par des militants « porteurs d’eau », supposés convaincus démocratiquement et formés pour être capacité d’agir en communistes. La vie politique des cellules (et des nombreux isolés) s’en trouve très réduite (à la réception de Saout Echaâb, aux finances) par l’absence de débats contradictoires et de formation.

Le cloisonnement (entre organes du parti, voire entre militants) et la vigilance (vis-à-vis des services de répression) ont souvent été opposés au travail de masse. Ce dernier s’en est trouvé largement sous-estimé, au profit d’un travail des militants tourné vers l’interne, avec prédominance des tâches organiques et surabondance des rapports écrits. 

Le parti fonctionnait plus comme un ensemble de réseaux. 

Le parti est devenu plus clandestin vis-à-vis des masses que des services de police, comme l’ont montré les nombreuses arrestations de militants communistes lors des évènements d’octobre 1988. 

A contrario, les nombreux recrutements lors des luttes de masse (UNEA et Volontariat pour la R.A.) ont montré combien l’activité de masse était bénéfique.

Trois conséquences majeures à cela : 

La faiblesse (qualitative et quantitative) du travail de masse n’a pas favorisé la formation et l’émergence de cadres communistes issus de la classe ouvrière et des couches populaires, pour mettre en adéquation la composition sociale du parti (notamment des organes de direction) avec ses objectifs. 

Le centralisme démocratique s’est trouvé réduit au centralisme sans démocratie. 

La cooptation systématique des responsables a aggravé le fossé entre base et direction du parti ; fossé dont l’ampleur a été illustrée par le congrès de 1990 : le nouveau 1er secrétaire est l’élu (proposé par la direction sortante) qui a obtenu le moins de voix ! 

L’information et sa circulation (dans les deux sens de la direction vers la base et inversement), était prisonnière du contrôle politique du circuit en réseau, un contrôle non collectif et donc non démocratique. 

Le cloisonnement, dans ces conditions, a contribué à anesthésier la résistance collective des communistes face à la sociale-démocratisation du parti. 

Basculement contre-révolutionnaire et social-démocratisation du PAGS 

C’est avec ces héritages que le parti aborde la dernière phase du processus de dégénérescence qui opère un basculement qualitatif définitif vers la social-démocratisation du PAGS. 

Influence de l’eurocommunisme et de la défaite du MCOI : URSS et camp socialiste 

L’eurocommunisme est au cours de la décennie 70 une nouvelle offensive idéologique impérialiste pour miner de l’intérieur le MCOI. 

Au prétexte de s’opposer aux limites du « socialisme réel », les dirigeants des partis communistes européens prônent la dissociation du « soviétisme » et du « socialisme ». Ces limites ne sont pas attribuées aux conditions matérielles concrètes de la construction du socialisme et du rapport de forces mondial mais à un défaut de la théorie marxiste-léniniste qu’il faudrait réviser. Elles ne sont pas analysées comme conséquence d’un processus révisionniste largement entamé dans le camp socialiste mais comme défaut congénital du marxisme-léninisme. L’antisoviétisme porté par l’eurocommunisme n’était qu’un anticommunisme. 

Le PCF (dont la proximité idéologique avec le MCOA est encore réelle) décide, dès 1976 l’abandon de la dictature du prolétariat, arguant « qu’elle ne recouvre pas la réalité, de notre politique, la réalité de ce que nous proposons au pays » (Rapport du comité central au 22ème congrès). 

Le PCI (un des plus grands partis d’Europe), dirigé alors par Berlinguer, tire en 1981 la conclusion logique de ce révisionnisme en disant : « La force progressiste issue de la Révolution d’Octobre est définitivement épuisée ».

L’approbation ou l’absence de démarcation du PAGS d’avec l’eurocommunisme révèle l’état idéologique du parti à ce tournant de son existence. L’eurocommunisme est perçu comme justifiant des erreurs et déviations déjà anciennes du parti (voie non capitaliste de développement et sous-estimation de la nécessité et des conditions de la prise du pouvoir, confusion entre parti et front, abandon de la perspective socialiste, etc.). 

La victoire de la contre-révolution en URSS sera perçue de la même façon. Alors que le Gorbatchévisme est la clôture du processus révisionniste enclenché avec les réformes de Kroutchev, il est salué par plusieurs dirigeants du parti qui y voient une « rénovation ». 

Aucune analyse matérialiste des causes de la défaite n’est mise en route laissant les militants isolés idéologiquement face à ce séisme. 

Influence de l’agressivité idéologique de la bourgeoisie à l’échelle internationale : crise du capitalisme et ses répercussions sur le mouvement ouvrier et syndical en Algérie 

La contre-offensive impérialiste mondiale de la seconde partie de la décennie 70 prend également la forme de la théorie monétariste diabolisant toute intervention de l’Etat. 

L’heure est à la « libéralisation de l’économie », à l’ouverture à la concurrence internationale et à la « bonne gouvernance », au prétexte de combattre les « lourdeurs de l’Etat » et la bureaucratie. 

Les décennies 1980 et 1990 voient le pouvoir algérien reprendre cette logique monétariste avec en conséquence un arrêt du processus d’industrialisation, l’abandon de la construction des bases industrielles d’une économie indépendante, et le déploiement en grand de la politique du « commerce international » industrialisant. 

Si le PAGS critique certains aspects du processus, il ne s’en démarque pas entièrement. La poursuite de sa politique de « soutien critique » dans un tel contexte a signification d’approbation des réformes. Les communistes algériens qui auraient dû être à la tête d’une contre-offensive ouvrière et syndicale de rupture avec Hamrouche se retrouvent une nouvelle fois désarmés par ce « soutien critique ». 

La montée du mouvement politique de droite sous couvert de religion : FIS, GIA, FIDA, … 

La contre-offensive impérialiste mondiale est une telle ampleur qu’elle anticipe les réactions des masses populaires devant la dégradation de leurs conditions matérielles d’existence. 

Tout en sapant l’outil stratégique qu’est le parti par l’eurocommunisme puis le gorbatchévisme, elle développe les outils de la répression des luttes ouvrières que ce soit sous la forme de coup d’Etat comme au Chili, ou sous la forme de groupes politiques se couvrant de la religion pour détourner la révolte populaire et si nécessaire la réprimer. Ces forces et partis sont à la fois critique du pouvoir en place et défendent un programme de libéralisation total de l’économie algérienne. 

S’il y a certes opposition avec une fraction du pouvoir sur le rythme et les bénéficiaires de la libéralisation, il y a également convergence sur sa nécessité. La violence fasciste de certains de ces groupes n’a pas été reliée à sa base économique. La contre-révolution économique en cours a pu se développer à la fois par les « réformes » du pouvoir et par l’anesthésie populaire du fait des violences fascistes de masse. 

Le besoin d’une analyse de classe de « l’Islam politique » n’a pas été rempli par une direction développant une critique unilatéralement idéologique de l’islam politique dans ses différentes variantes algériennes. Bien avant la RPI la contradiction de classes était déjà remplacée par une soi-disant contradiction modernité/barbarie. 

La RPI 

La résolution politico-idéologique est l’aboutissement de ce long processus. 

Elle n’est que la formalisation d’une ligne droitière déjà en œuvre depuis plusieurs décennies. 

Elle signifie un seuil qualitatif préparé antérieurement par une accumulation quantitative de décisions d’abandon du marxisme-léninisme. 

Sans être exhaustif au moins quatre dimensions de la RPI sont significatives de son caractère de seuil nouveau transformant définitivement le parti en parti social-démocrate.

Abandon de l’analyse en termes de luttes des classes 

La contradiction principale n’est plus dans la RPI celle entre la classe ouvrière et la bourgeoisie mais celle entre la modernité et la barbarie. 

Cette « mutation » se réalise alors même que les classes sociales se sont coagulées depuis l’indépendance et que l’Algérie se caractérise désormais par l’existence des deux classes fondamentales du capitalisme dans un contexte national où les tâches nationales, paysannes et démocratiques ne sont pas encore entièrement achevées.

On retrouve ici la vieille théorie révisionniste des forces productives prônant que le socialisme est le résultat mécanique des forces productives. 

Ce développement est ainsi absolutisé comme « modernité » à défendre. 

La lutte et les alliances nécessaires contre les forces ultraréactionnaires et fascisantes n’est pas avancée comme une tactique liée au rapport des forces mais comme une stratégie couvrant toute une époque. 

Il ne s’agit rien de moins que de l’abandon de la lutte des classes et de l’organisation autonome de la classe ouvrière.

La destruction du parti n’en est qu’une conséquence logique et inévitable. 

La colonisation aurait pu être plus utile si pas de sang et de feu ! 

Cette théorie révisionniste des forces productives ne pouvait que déboucher sur du révisionnisme historique à propos de la colonisation. 

Ce qui est reproché à la colonisation c’est désormais sa forme (violente et oppressive) et non son principe. 

Ce qui est occulté ici c’est ce que le 6ième congrès de l’Internationale Communiste a mis en avant : le colonialisme ne signifie pas le développement des forces productives dans les colonies mais un développement restreint aux intérêts de la métropole coloniale. 

La théorie des forces productives conduit en outre à des explications culturalistes arguant que l’état de développement d’une société n’est pas le résultat de la lutte des classes qui la caractérise mais de la pénétration ou non de la « modernité » dans son fonctionnement. Le peuple et sa « culture » sont ainsi présentés comme responsables de la situation alors qu’ils sont les victimes d’une contre-révolution économique et idéologique.

Il ne reste comme solution que l’alliance avec les partisans de la « modernité » comme jadis certains défendait l’alliance avec le colonialisme censé apporté la « modernité » et les « forces productives ». 

La RPI n’est ainsi qu’une nouvelle justification de la mise en dépendance de la nation algérienne à l’impérialisme dans un vocabulaire rénové mais qui débouche sur les mêmes conclusions que la « mission civilisatrice » coloniale. 

Question du pouvoir non posée, ce qui limite le parti à des actions de défense syndicale. 

Une telle analyse signifie l’abandon explicite de la question de la prise du pouvoir par la classe ouvrière. 

Cette tâche est considérée comme n’étant pas à l’ordre du jour, tant à court terme qu’à long terme. Toute une période historique de développement de la « modernité » est présentée comme nécessaire et incontournable avant d’aborder cette tâche et de préparer le parti à sa réalisation. 

Il ne reste pour les communistes q

u’une mission de promotion de cette « modernité » d’une part et une mobilisation de type syndicale pour que cette dernière soit plus « sociale ». 

Le parti est ainsi réduit à des actions de défense syndicale dans un front avec tous les partisans, même bourgeois, de la « modernité ». 

Accompagner l’exploitation capitaliste des travailleurs par la promotion d’un « accompagnement social » cela a un nom : la social-démocratie. 

La lutte anti-impérialiste déconnectée de la lutte anti capitaliste au plan interne. 

Le maintien d’un certain discours anti-impérialiste (d’ailleurs partiel et inconséquent) sur le plan international ne doit pas faire illusion. 

Cette dénonciation se réalise sans articulation avec les classes sociales nationales.

Or l’impérialisme n’est pas qu’une réalité extérieure. Il s’appuie sur des classes nationales pour maintenir et développer sa mainmise. 

Il est de ce fait illusoire de vouloir le combattre en faisant front avec les classes nationales qui en sont l’expression au prétexte de développer la « modernité ». 

Ces quatre dimensions de la RPI suffisent à la caractériser comme le passage qualitatif à la social-démocratie, c’est-à-dire comme la clôture d’un long processus d’abandon du marxisme-léninisme, lui-même rendu possible par une série de facteurs : les mutations du rapport de force mondial ; la coagulation de la bourgeoisie en tant que classe depuis l’indépendance ; les conditions non démocratiques de fonctionnement du parti ; la composition de classe du parti ; etc. 

Que faire en priorité pour que la rupture avec la social-démocratisation à la base de la destruction du PAGS soit réelle et définitive, pour que la relance du Mouvement Communiste et Ouvrier en Algérie soit réelle et durable ? 

Ce qui est possible et nécessaire pour aller dans cette direction c’est, d’abord, d’être utile à celles et ceux qui se battent contre l’exploitation, l’oppression et contribuer à rompre le cycle prolongé des défaites du camp du travail.

Car les questions des conditions de vie et de travail, de privation d’emploi (chômage), sont des préoccupations majeures par lesquelles les travailleurs prennent conscience de la nécessité de l’organisation de la lutte politique, jusqu’à la nécessité du parti communiste. 

Dans des combats de classe et de masse, des forces militantes (anciennes et nouvelles) seront ainsi accumulées pour nourrir et composer u futur parti de classe. 

Dans le même temps, développons des échanges et des débats sur le MCOI et le MCA, pour comprendre la contre-révolution en URSS et dans le monde, pour apprendre des succès et des échecs de nos aînés communistes, pour mieux connaître la formation économique et sociale algérienne, pour mieux combattre la social-démocratie en Algérie.

Pour être communiste dans l’Algérie d’aujourd’hui !

Source : http://www.raina-dz.net/spip.php?article1186

 

 

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